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  3. Dépendances 67
  4. La consommation non problématique: un concept pour restaurer le pouvoir d’agir en résidentiel

Rétablissement et droits humains
Barbara Zbinden (Haute école de travail social et de la santé Lausanne)
La consommation non problématique: un concept pour restaurer le pouvoir d’agir en résidentiel
Jean-Julien Rappo et Nicolas Stock (« Toulourenc », Association Argos)
Collège de rétablissement
Jean-Dominique Michel (Pro Mente Sana)
Interview
de Graziella Golf et Thomas d’Hauteville (REV) par Jean-Félix Savary (GREA)
Incarner le rétablissement: les pairs practiciens en santé mentale
Caroline Suter (association re-pairs)
L’approche du rétablissement dans l’aide aux personnes dépendantes
Mirjam Weber (Office fédéral de la santé publique)
Comparer le point de vue des professionnels et des usagers sur le rôledu contexte social dans le parcours de rétablissement
Tim Greacen (Groupe Hospitalier Universitaire Paris Psychiatrie et Neurosciences) et Antoine Simon (Projet DURESS)
L’intervention par les pairs auprès des parents qui consomment des drogues: une approche novatrice pour soutenir les familles
Sarah Bell (Université de Montréal)
Post Scriptum – Vers une normalisation des traitements médicamenteux du sydrome de dépendance aux opioïdes?
Olivier Simon, René Stamm, Robert Hämmig, Willem Scholten, Cheryl Dickson, Valérie Junod

Dépendances 67 - Le pari du rétablissement: La consommation non problématique: un concept pour restaurer le pouvoir d’agir en résidentiel

avril 2020

La consommation non problématique: un concept pour restaurer le pouvoir d’agir en résidentiel

Jean-Julien Rappo et Nicolas Stock (« Toulourenc », Association Argos)

Au Toulourenc, l’association Argos a récemment introduit un nouveau modèle en résidentiel de consommation non problématique. Issu de profondes réflexions de fond, il se base désormais sur une dialectique réelle entre usagers, professionnels et environnement social. Il se propose de restaurer le pouvoir d’agir de toutes les parties prenantes par un travail réflexif de tous. Ces promoteurs nous le décrivent ici pour Dépendances. (réd.)

Le vieillissement des personnes confrontées à des problèmes de dépendance, la chronicité des situations, l’accroissement de la précarité bio-psychosociale et l’augmentation des comorbidités nous ont amenés à redéfinir nos missions et la déclinaison de nos prestations avec la nécessité de penser une structure institutionnelle stationnaire comme un lieu d’insertion et d’appartenance sociale. Sur le site du Toulourenc, un des deux centres d’habitation de l’association Argos1, nous avons travaillé dès 2017 à l’élaboration d’un nouveau dispositif d’accompagnement destiné à des séjours sans durée limitée, sur le modèle de l’hébergement protégé, avec pour objectif principal la stabilisation et l’amélioration de la qualité de vie des personnes accueillies sur le plan bio-psychosocial. Pour reprendre les propos de Marc-Henry Soulet 2: «L’intégration ne sera plus un idéal, un but à atteindre, mais une place relative où les personnes pourront trouver un degré d’autonomie et des conditions pas trop mauvaises d’existence ».

Dans cette logique, il nous a semblé nécessaire de pouvoir penser l’intégration de la consommation dans le dispositif d’accompagnement. Nous avons rapidement pris le parti d’écarter la notion de consommation contrôlée. En effet, dans le paradigme de la consommation contrôlée, la question est de savoir qui a le contrôle sur la consommation. Dans notre expérience d’accompagnement, la capacité à gérer son abstinence ou sa consommation fait davantage appel à des ressources extrinsèques, essentiellement liées au cadre institutionnel, plus qu’à la capacité de la personne accompagnée à développer des compétences intrinsèques. Il nous a donc semblé préférable de travailler la modélisation et le développement d’un concept d’intervention, nous permettant de penser l’intégration de la consommation dans notre dispositif.

Un modèle tripartite

À partir de ce constat, nous avons fait le choix de développer un concept d’intervention à partir de deux termes : la consommation non problématique et raisonnée.

Une définition fine et individualisée de ce qui est problématique permet un regard sur la consommation non problématique. Dans cette approche, la question posée est de savoir qui définit le problème ? Nous sommes partis sur la nécessité d’élaborer une relation tripartite dans la définition du problème. Il s’agit ici de conjuguer les critères du bénéficiaire (ce que je me dis de moi-même ?), les critères externes (ce que les autres disent de moi ?), et les critères institutionnels (mode de vie en milieu institutionnel). C’est donc l’ensemble de ces critères qui permet une définition collective du problème, des ressources et donc des actions à entreprendre. Cette codéfinition garantit une réponse personnalisée et favorise la collaboration entre les différents partenaires.

Par ailleurs, la consommation non problématique se définit de manière globale comme une consommation ne détériorant pas l’équilibre bio-psychosocial de la personne. Il s’agit pour les professionnels d’accompagner les individus dans l’apprentissage d’une gestion de leur consommation afin qu’ils puissent stabiliser ou améliorer leur qualité de vie. Les critères s’inscrivent dans une vision complexe et multifactorielle de la santé d’une personne. En voici quelques exemples : la stabilisation des pathologies existantes, le maintien des soins, la diminution des prises de risques sanitaires, l’absence de dépendance ou d’abus de substances, une capacité à rester en contact avec la réalité, le maintien du lien social et le non-isolement.

Cette démarche propose à la personne accompagnée de construire une dialectique entre sa consommation et son rapport au monde et à l’autre. Il s’agit de faire exister une dimension normative, par la confrontation aux normes et conventions sociales, qui régissent la possibilité de vivre ensemble dans un espace collectif, tenant compte des particularités individuelles et singulières, dans le respect et l’attention à l’autre. Nous proposons donc aux personnes accueillies, de confronter leurs consommations à la question de leurs identités citoyennes dans une réflexion portée sur le vivre ensemble et leur appartenance sociétale. Cela implique d’incarner, pour les professionnels, une posture faisant exister la norme sans pour autant en faire la promotion. Cet accompagnement réflexif propose à la personne accompagnée de se positionner dans une démarche active et conscientisée autour de sa consommation, et de sortir d’une dimension projective qui voudrait que la société soit le seul vecteur de marginalisation. Il s’agit de sortir d’une logique de victimisation pour restaurer progressivement une posture d’acteur en capacité d’agir dans le monde social. Ce processus passe par le renforcement de l’estime de soi, des habiletés sociales et la régulation de la consommation.

La question qui est posée est de définir des comportements et des modes relationnels en adéquation avec une vie en collectivité. Dans cette logique, il n’est pas possible de prédéfinir des critères définissant une consommation problématique. Il est préférable de définir des limites autour de comportements problématiques en lien avec la consommation.

Le terme de consommation raisonnée s’entend non pas dans une définition raisonnable, qui sous-tendrait une dimension morale, mais comme la capacité à porter un regard, une réflexion sur sa consommation. Nous sommes convaincus que ce raisonnement est essentiel à une meilleure compréhension de soi et donc à un équilibre de vie satisfaisant. Le développement de la capacité de réflexion se trouve, de fait, à la base de notre action. Le processus réflexif permet à la personne de développer sa capacité à explorer les causes plurifactorielles de sa consommation, d’acquérir les connaissances sur les risques et les conséquences de celle-ci dans une logique de reconstruction du pouvoir d’agir.

Cette approche permet de faire exister les compétences sociales des personnes accompagnées, leurs besoins, leurs envies, mais également la réalité externe avec les conventions et les normes sociales. Ceci permet donc de décliner l’accompagnement (durées de séjours variables, insertion professionnelle classique ou adaptée, insertion sociale variée) et les lieux de vie (résidentiel, semi-résidentiel, appartement protégé ou relai). L’objectif est de permettre à la personne accompagnée de trouver un équilibre biopsychosocial satisfaisant pour elle-même et son environnement, quel que soit le lieu où elle se trouve et quel que soit son projet de vie.

Abstinence et consommation, quelle cohabitation?

Dans notre dispositif d’accompagnement, nous avons pris le parti d’accueillir à la fois des personnes désireuses de s’inscrire dans la logique d’une « consommation non-problématique », mais également de permettre à celles qui le souhaitent de s’inscrire dans un projet d’abstinence dans un contexte dans lequel la consommation est présente. Nous faisons le constat que les personnes que nous accueillons s’inscrivent généralement dans un projet d’abstinence par rapport au produit avec lequel ils entretiennent une relation de dépendance. Les individus se retrouvent alors dans une dynamique autour de la relation consommation – abstinence. Le partage expérientiel, autour de la consommation ou de la non-consommation dans le groupe de pairs, permet un travail d’exposition qui fait exister le regard de la personne qui a consommé face à la personne abstinente et vice versa. Cette dynamique s’inscrit également dans une dialectique entre les personnes accompagnées et les professionnels.

L’espace collectif du résidentiel est donc pensé comme un lieu de socialisation et d’insertion, dans une dynamique citoyenne de réhabilitation des savoir-faire sociaux, en proposant une vie en collectivité et une prise en charge individualisée. Cela implique pour chaque individu un contrôle de sa consommation qui demande à être conjuguée avec les exigences du vivre ensemble. Avec le soutien des professionnels, le groupe de pairs contribue activement à la régulation des conduites individuelles.

Si le programme d’accompagnement intègre la consommation, la détention et la consommation de produits restent proscrites à l’intérieur de l’institution. L’enjeu est de concevoir un lieu de vie protégé, distancié de la réalité de la rue. Il s’agit également d’assurer l’intégration de notre structure dans son environnement proche. Les personnes accompagnées sont donc encouragées à entrer dans une démarche de réduction des risques en utilisant les prestations de notre partenaire, l’association Première ligne, par l’intermédiaire de son espace d’accueil et de consommation supervisée, le Quai 9.

Deux ans après l’application de ce programme, quels constats?

Nous sommes officiellement entrés dans ce nouveau paradigme, le 1er janvier 2018. Deux ans après sa mise en place, nous constatons une cohérence accrue entre nos prestations et la réalité du public accueilli.

Tout d’abord, la plupart des bénéficiaires maintiennent une abstinence vis-à-vis des produits avec lesquels ils entretenaient une relation de dépendance. Ensuite, la relation à la consommation est davantage partagée avec les professionnels avec une parole libérée d’un regard moralisateur. De manière générale, les personnes accompagnées se sont engagées activement dans le projet, engagement indispensable à sa légitimation. Le nouveau programme permet également un accès facilité au dispositif genevois de réduction des risques ainsi qu’un partenariat renforcé avec le service d’addictologie des HUG et son programme spécialisé dans le traitement assisté par la diacétylmorphine (PEPS). Par ailleurs, la mise en mouvement des individus est devenue un enjeu majeur avec l’observation d’une dynamique croissante d’amotivation chez nos bénéficiaires. Dans notre pratique d’accompagnement, la régulation du rythme de vie est définie par le cadre institutionnel avec l’exigence de se lever le matin et de participer aux temps de repas ainsi qu’à l’intendance du lieu de vie.

Dans l’accompagnement à une consommation non problématique, nous faisons état d’une augmentation significative de la consommation de THC, principalement utilisé comme substitut à d’autres produits avec parfois un transfert dans la relation de dépendance. Enfin, les personnes qui présentent une dépendance à l’alcool sont celles qui montrent le plus de difficultés à conjuguer la gestion de leur consommation avec les exigences du « vivre ensemble ».
À ce jour, les enjeux restent importants. Ils nous poussent à maintenir une réflexion sur l’intégration, dans la cité, des personnes confrontées à des problèmes de dépendance. Le processus de rétablissement doit prendre en compte un contexte social et économique qui continue à se durcir. Cette réalité amène les professionnels du Toulourenc à interroger les perspectives d’insertion auprès d’un public dont les conditions de vie bio-psychosociale continuent à se dégrader. Il est important de continuer à accompagner les personnes qui s’adressent à nous, dans une logique citoyenne d’autonomisation et de renforcement de leurs capacités à agir. Les dispositifs d’insertion doivent s’interroger sur leurs capacités et la nécessité de développer des prestations ciblées, tenant compte de la réalité interne et externe des personnes accompagnées.

Ce nouveau paradigme nous place, dès lors, dans une nécessaire évolution et redéfinition de nos pratiques professionnelles davantage tournées vers un accompagnement palliatif que dans une dimension thérapeutique à visée transformatrice. Dans cette perspective, il s’agit « d’accompagner pour aider à tenir et non pour aider à changer »2.

 

67_2_La-consommation-non-problematique-un-concept-pour-restaurer-le-pouvoir-dagir-en-residentiel_-Rappo-Stock_dependances_2020.pdf
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  1. Argos agit dans le cadre de la politique fédérale et cantonale des quatre piliers. Elle a pour but la création et la gestion de dispositifs destinés à répondre de manière ciblée aux besoins des personnes confrontées à la problématique de l’addiction et à ses multiples conséquences bio-psychosociales.[↑]
  2. Soulet M La reconnaissance du travail social palliatif. Dépendances 2007 ; 33 : 14-18.[↑][↑]

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