décembre 2005
La consommation de cannabis e tde ses dérivés est aujourd’hui un fait de société. Qu’on le veuille ou non, elle s’est profondément ancrée dans les pratiques des jeunes générations en Suisse. Au vu de l’ampleur du phénomène, il n’est pas surprenant que cette question ait mobilisé l’attention publique ces dernières années. Le débat sur la révision de la Lstup s’est même cristallisé sur cette question, faisant capoter l’ensemble de la loi, malgré la marginalité de cet objet par rapport à l’importance des autres éléments qui y figuraient.
Malheureusement, l’émergence de nouvelles craintes autour du cannabis sur la place publique n’a pas débouché sur une recherche active de solutions. L’opportunisme politique et le dogmatisme ont dominé, ce qui n’a fait qu’ajouter de la confusion dans un débat déjà fortement émotionnel. Or, pour être efficace, un message de prévention se doit d’être scientifiquement fondé, cohérent et porté de manière unanime par les différentes institutions sociales.
Pour le cannabis, nous en sommes si loin que nous ne pouvons pas nous empêcher de mettre cette situation en relation avec l’augmentation massive de la consommation, surtout chez les plus jeunes, à savoir chez ceux qui ont justement le plus besoin de repères et d’un discours social cohérent. Même si cette tendance générale est à mettre en relation avec une augmentation globale de la consommation de produits psychotropes, alcool entête, on pourrait espérer plus de responsabilité sociale de la part de nos élus pour enfin traiter un sujet aussi important de manière cohérente et pragmatique.
Cependant, il existe aujourd’hui une volonté politique de sortir de l’impasse. Reste maintenant à trouver une direction consensuelle entre préventologues, médecins, parents, enseignants et politiciens. Le groupe inter-partis (parlementaires socialistes,démocrates-chrétiens, verts et radicaux, soutenus par le Fachverband Sucht et le GREAT), mais aussi la NAS-CPD (Communauté nationale de travail «politiques drogues») s’attèllent actuellement à cette tâche en analysant les différents modèles possibles.
Pour mettre en perspective ce débat national, nous livrons dans ce numéro des éclairages sur la gestion sociale de la problématique du cannabis. Au-delà de la dimension purement «sanitaire», les éléments sociaux doivent être pris en compte pour élaborer des réponses politiques au problème. Après un nécessaire recadrage sur la substance, les connaissances disponibles sur ses effets et les données épidémiologiques, nous nous attacherons donc plus spécifiquement à la manière dont est vécue cette problématique, que ce soit par les professionnels, les cantons, mais aussi les consommateurs.
Jean-Félix Savary (GREAT)