janvier 2016
Addiction(s) : recherches et pratiques remplace la revue Actal, éditée dès 2006 par la F3A 1. À l’époque, il s’agissait d’ouvrir un espace d’échange aux acteurs de l’alcoologie. Portée ensuite par la Fédération Addiction, elle a gardé le même objectif pour l’addiction. Aujourd’hui, c’est en s’ouvrant à l’espace francophone qu’elle veut continuer d’aider aux échanges et à la mise en commun. Ce choix francophone peut sembler à contre-sens, éloignant d’une grande partie des publications scientifiques par exemple. Mais il est assumé : la langue maternelle porte souvent nos premières et dernières paroles, elle est celle de nos souvenirs, elle fait lien et histoire. Avec ce choix, comme Actal, Addiction(s) : recherches et pratiques restera une revue de proximité.
Proximité, car les partenaires de la revue partagent, en plus d’une langue, une conception commune de la problématique des addictions. Promouvant, chacun dans leur pays, une approche médico-psycho-sociale de la question, ils se retrouvent aussi régulièrement au sein de projets partagés. Pour autant, cette conception commune n’est pas uniforme, car nos pays sont différents : leurs cultures, leurs systèmes de santé, leurs problématiques addictives sont spécifiques.
Cette revue répond donc au souhait de mettre en commun nos ressources, leurs complémentarités et leurs différences. Et de faire ainsi avancer nos réponses aux addictions dans chacun des pays, au sein des services, mais aussi sur le plan de leur compréhension sociale et politique.
La Fédération Addiction qui en assure la coordination technique, le GREA (Groupement romand d’études des addictions) en Suisse, la Fedito Bxl asbl (Fédération bruxelloise francophone des institutions pour toxicomanes) en Belgique, l’AIDQ (Association des intervenants en dépendance du Québec) au Québec sont des fédérateurs d’acteurs. Ils unissent des personnes ou des dispositifs dans un mouvement de mise en commun des compétences, au sens de ce nécessaire partage des pratiques qui est cœur de la dynamique d’adaptation des réponses.
En France, de par sa structuration fondée sur l’université et ses laboratoires, la recherche avait pu sembler loin des problèmes rencontrés par les acteurs, qui avançaient de leur côté sur des expérimentations, des innovations, en dialogue avec les usagers et l’auto-support. À l’impulsion de l’ANRS 2 comme dans le cadre de la Mission INSERM 3 « Associations Recherche & Société », avec les liens tissés avec l’EHESS 4 ou par le travail de croisement fait au sein de la Mildeca 5, la recherche a su rejoindre les préoccupations des acteurs et des usagers. Mais elle garde ses contraintes spécifiques, nécessité de publications dans les revues ad hoc, effets copyright ou besoin de notoriété. Légitimes, elles éloignent parfois les travaux d’une partie de leur lectorat cible. C’est ce manque qu’Addiction(s) : recherches et pratiques veut en partie pallier, en renforçant l’accessibilité des informations pour l’ensemble des professionnels. Le RISQ (Recherche et intervention sur les substances psychoactives – Québec) au Québec, de par sa grande expérience sur ce type de recherches et sur ces dynamiques, est sur ce plan un précieux partenaire.
Addiction(s) : recherches et pratiques se veut donc un acteur modeste mais utile : un numéro par an, sur une thématique unique, pour 15 à 20 articles différents, qui font le point sur les avancées de la recherche et sur la diversité des pratiques et expériences de terrain, au travers de points de vue d’usagers, de professionnels et de chercheurs. Mais ils doivent aussi en dégager les enjeux politiques, tant nos associations sont conscientes que traiter recherche et pratiques sans oser les confronter à leur « acceptabilité politique », c’est se priver d’un élément essentiel de l’analyse.
Le thème de ce premier numéro s’est naturellement imposé, à l’approche de la 25e conférence internationale sur la réduction des risques (HR17) de mai 2017 à Montréal, et du Sommet francophone sur la réduction des méfaits liés aux drogues qui va la précéder.
Approche promue par l’ensemble des partenaires porteurs de cette revue, la réduction des risques nous a semblé exemplaire. D’abord par l’effort de recherche qui l’entoure depuis de nombreuses années – par exemple sur les SCMR 6, le programme Aerli 7, les Trod 8… Ensuite, par l’efficacité des outils qu’elle a permis de mettre en place. Enfin, par les difficultés d’acceptabilité politique qu’elle pose, comme le démontrent les longs combats pour la création de SCMR ou la diffusion de la naloxone en Belgique, en France ou au Québec.
Nous aurons donc matière à échanger et à mieux nous connaître.
Jean-Pierre Couteron, Président de la Fédération Addiction