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  2. Dépendances
  3. Dépendances 11
  4. Alcool et toxicomanies: faut-il une approche spécifique selon le sexe?

Des femmes au genre: que penser de la différence des sexes?
Patricia Roux (Université de Lausanne)
Des espaces non mixtes en institution
Violaine Bernard (ARGOS/CRMT)
L’approche spécifique hommes dans le domaine de la dépendance
Herbert Müller (Casa Fidelio) ; Traduction: Claire Roelli (COSTE)
Les besoins spécifiques des femmes dans le domaine des toxicodépendances
Marie-Louise Ernst (OFSP)
Un réseau d’accompagnement des mères toxicomanes et de leurs enfants
Anne Dentan (Rel’ier) ; Caroline Alvarez (Service de protection de la jeunesse) ; Brigitte Nicod
Dépendances aux drogues illégales et prostitution
Valérie Dupertuis (Fleur de pavé) ; Geneviève Ziegler (Fleur de pavé)
Alcool et toxicomanies: faut-il une approche spécifique selon le sexe?
Anne-Catherine Menétrey (psychologue)

Dépendances 11 - Pour une prise en compte des rapports hommes-femmes: Alcool et toxicomanies: faut-il une approche spécifique selon le sexe?

septembre 2000

Alcool et toxicomanies: faut-il une approche spécifique selon le sexe?

Anne-Catherine Menétrey (psychologue)

Comment sont perçues les femmes dépendantes? Quelles hypothèses sont émises au sujet de leur maladie? Quelles images sont véhiculées au sujet des femmes dépendantes dans notre société? Quelles sont les spécificités de la dépendance féminines? Faut-il des traitements et une prévention spécifique pour les femmes? Telles sont les questions traitées dans cet article tiré d’une conférence donnée par Anne-Catherine Menétrey dans le cadre de l’ANPA, à Lepin-le-Lac, en 1997 (réd.).

C’est en 1990 que j’ai créé un groupe de travail1 sur la question de l’alcoolisme des femmes ou, plus généralement, sur les comportements de consommation et sur les dépendances au féminin. Pour la direction de l’institut suisse de prévention de l’alcoolisme et autres toxicomanies, ISPA, c’était une idée inattendue, mais elle fut accueillie favorablement, dans la mesure où la proposition «femmes et alcool» pouvait correspondre aux représentations qu’on se faisait à l’époque, celles de la femme en tant qu’épouse d’un homme alcoolique, ou en tant que mère ou future mère, portant la responsabilité de l’enfant à naître.

Ce ne sont pas ces aspects-là qui m’avaient inspiré l’idée de ce groupe de travail. Je voyais plutôt les femmes en elles-mêmes, dont les recherches ne nous parlaient pratiquement jamais, car il était rare, à l’époque, qu’on présente des données séparées pour les femmes et les hommes. Je savais aussi que les femmes sont minoritaires dans les lieux d’accueil et de traitement pour alcooliques et que les circonstances particulières de leur entrée dans la consommation abusive ne pouvaient pas être prises en compte dans ces conditions. J’éprouvais enfin un malaise personnel à constater le silence, la gêne ou la réprobation suscitées, même chez les professionnel/les, par les femmes toxicomanes ou alcooliques.

Ce groupe de travail, composé exclusivement de femmes, a mis du temps à trouver ses marques et à formuler ses hypothèses. Au départ, les positions des unes et des autres, en correspondance avec ce qu’on trouvait dans les livres consacrés à ce sujet, se déterminaient autour de 4 options. Selon la première, les femmes consommaient de l’alcool de manière névrotique et clandestine, dans le secret de leur foyer. À cette hypothèse, les «féministes» opposaient l’idée que les femmes boivent par plaisir, qu’elles l’on toujours fait, qu’elles boivent de manière aussi conviviale que les hommes, et que ce sont eux qui ont tenté de les tenir éloignées des rituels virils de la dégustation. Plutôt masculine, la troisième option allait dans le sens d’une consommation en évolution, liée à l’émancipation des femmes. Elles se mettent à vivre comme les hommes, à adopter leurs comportements, elles travaillent, elles sortent, donc elles boivent.

Avec une nuance légèrement revancharde, on laissait entendre qu’ayant voulu l’égalité, elles connaîtraient aussi les effets secondaires et les maladies liées aux excès de la vie sociale. Enfin, la quatrième option, qui est celle sur laquelle nous nous sommes mises d’accord et que je me propose de développer ici, privilégie la thèse selon laquelle la dépendance alcoolique est la même maladie chez l’homme et chez la femme, mais que les modes de sortie, ainsi que les circonstances de son apparition et les facteurs de risque, en amont, sont différents, une différence qui justifie une prévention et des prises en charge spécifiques. Il ne s’agit nullement ici de se laisser entraîner dans une quelconque guerre des sexes, la seule chose qui compte étant l’efficacité de notre politique de prévention.

Il n’en reste pas moins que l’approche de ces questions doit beaucoup à la subjectivité et aux représentations sociales. La manière dont tous nous nous engageons dans la prévention est relative à la perception de notre propre consommation d’alcool et le regard que la société porte sur nous. Je me suis intéressée à l’image de la femme dans la publicité pour l’alcool, ou, à l’inverse dans les affiches contre l’alcool, et j’y ai trouvé tous les mythes traditionnels. Le féminin, c’est l’interdit, le mal, la tentation, l’envoûtement. La femme est d’un côté représentée comme la déesse païenne de la terre et de la fécondité, de l’autre comme la mère pétrie de vertus, comme l’épouse patiente, comme l’infirmière soignant les blessés de guerre à coups de cognac… Étonnez-vous après ça que les femmes rencontrent quelques problèmes d’identité ou quelques conflits de rôles!

Des fragilités précoces

Si les filles semblent connaître moins de problèmes psychiques que les garçons dans l’enfance, ce n’est plus le cas à l’adolescence, car elles vivent leur puberté plus difficilement qu’eux2. Les enquêtes périodiques que nous conduisons sur la santé des écoliers3 révèlent des différences intéressantes dans les préoccupations des filles et des garçons. Entre 11 et 16 ans, les soucis des filles concernent prioritairement les sentiments, l’identité et le look, alors que les garçons sont surtout sensibles aux contraintes scolaires ou matérielles. Les filles expriment des préoccupations plus marquées concernant les relations avec les amis proches et la famille, redoutant les conflits avec ou entre les parents, alors que les garçons mettent la priorité sur les sorties et les copains. Par ailleurs d’autres recherches4 posent des hypothèses sur les stratégies de «coping» différenciées en fonction du sexe. Ainsi, les filles se montreraient plus sensibles aux tracas quotidiens, plus démunies pour faire face aux difficultés et surmonter les événements négatifs dont elles croient devoir s’attribuer la responsabilité. On dit, schématiquement, que les femmes attribuent leurs réussites au hasard et leurs échecs à elles-mêmes, alors que les hommes feraient l’inverse, attribuant leurs réussites à leurs capacités et leurs échecs à la malchance.

Les caractéristiques des filles, dès l’adolescence, peuvent donc constituer autant de facteurs de risques par rapport à des difficultés ou des dépendances futures. On constate ainsi une certaine fragilité au niveau de l’image de soi, pouvant entraîner par la suite des sentiments de honte portant soit sur l’apparence physique soit sur la non-conformité par rapport aux rôles traditionnels. Autre caractéristique, la priorité accordée au pôle émotionnel peut aller jusqu’à une grande vulnérabilité à la sécurité affective, accompagnée d’une agressivité retournée contre soi, avec des risques de somatisation. Enfin l’importance primordiale du pôle relationnel entraîne une forte responsabilisation à l’égard d’autrui, avec une tendance au dévouement qui peut aller jusqu’à l’aliénation et l’auto-exploitation. La culpabilité accompagne souvent la vocation d’aider autrui. Dans ce même ordre d’idées, la fragilité aux conflits familiaux fait parfois des filles les victimes toutes désignées de la violence ou des abus sexuels, subis dans le silence, précisément pour échapper aux conflits ou à l’abandon. Ces éléments de différenciation ont d’ores et déjà des répercussions sur la prévention. En effet, l’apprentissage de la résistance à la pression du groupe semble n’être d’aucune utilité pour les filles, tandis que l’appel à la solidarité et à l’entraide peut se révéler carrément contre-productif, dans la mesure où l’aide est précisément ce qui rend les filles dépendantes.

Des modes de réaction différenciés

Les facteurs de risques qu’on vient de décrire sont liés à des enjeux, des dimensions, des préoccupations qui se traduisent en termes de comportements, avec des caractéristiques propres aux jeunes filles ou aux femmes. En effet le mal-être et les problèmes liés à l’adolescence provoquent souvent chez les filles des troubles corporalisés, avec des symptômes psychosomatiques, des tendances dépressives, des troubles de l’alimentation et des modes de consommation portant plus souvent sur les «drogues» adaptatives, à savoir le tabac et les médicaments. Les garçons et les hommes, eux, adoptent plus souvent des comportements extériorisés: violence, prises de risque, délinquance, consommation excessive (ivresse, défonce) de drogues illégales et d’alcool. Ces comportements ont également des conséquences différenciées, allant dans le sens d’une morbidité plus grande pour les femmes et d’une mortalité plus précoce chez les garçons. Entre 15 et 19 ans, les garçons meurent trois fois plus souvent que les filles d’accidents et de suicide.

Pour en venir plus spécifiquement à la consommation de psychotropes, on ne constate pas une évolution croissante dans la consommation des femmes, sauf pour le tabac. Pour ce qui concerne l’alcool, la proportion des maladies alcooliques reste semble-t-il de 1 femme pour 2 hommes; elle est d’une femme toxicomane pour trois hommes pour ce qui concerne les drogues dures. En revanche, pour le tabac, les jeunes filles sont à égalité avec les jeunes gens, ou elles les dépassent même légèrement, alors que la proportion de femmes qui abusent de médicaments psychotropes est nettement supérieure à celle des hommes, et ceci dès l’enfance.

Indépendamment du nombre des consommatrices, on constate des différences dans les modes de consommation. Il reste vrai que les femmes s’alcoolisent plus fréquemment de manière solitaire, et chez elles la polytoxicomanie est nettement plus fréquente. Une enquête sur le devenir des patients alcooliques traités dans des lieux de traitement5 montre que la moitié des femmes consommaient à la fois de l’alcool et des médicaments, ce qui n’était le cas que d’un homme sur cinq. En revanche, la consommation conjointe de drogues légales et illégales concernait 6% des femmes comme des hommes.

Abus et dépendances, quelques facteurs de cause

Parmi les causes souvent citées d’une alcoolisation excessive chez les femmes, on trouve en premier les abus sexuels et la violence dans l’enfance. La peur de perdre leur sécurité affective semble être pour les filles une des raisons pour lesquelles elles parviennent à supporter dans le silence des situations inacceptables, qui engendrent à long terme la honte et la haine de soi. On parle moins souvent, en revanche, de la violence actuelle suivie dans la vie quotidienne des femmes. De plus, et là on atteint l’intolérable, il faudrait encore mentionner les abus sexuels subis par des femmes alcooliques ou toxicomanes de la part de leur thérapeute. Sur ce point, les chiffres se situent entre 10 et 30% des femmes en traitement.

Une autre raison de l’entrée des femmes dans la consommation excessive concerne leur manière d’accompagner un partenaire qui consomme. Il y a à cela plusieurs motifs : la femme se sent souvent tenue d’accompagner son compagnon, par peur de le perdre si elle le laisse sortir seul. Parfois, c’est lui qui fournit le produit, notamment quand il est illégal. Parfois également, c’est pour le sauver que la femme accepte de consommer avec lui, se promettant qu’ils arrêteront et qu’ils s’en sortiront ensemble. En tout cas de nombreuses femmes affirment qu’elles sont entrées dans la consommation à cause de leur compagnon, alors qu’aucun homme n’admettra jamais la réciproque.

S’il semble admis que les femmes accordent, dès l’enfance, une priorité au pôle émotionnel et qu’elles disposent ainsi, souvent, d’un réseau relationnel étendu (notamment pour les toxicomanes aux drogues illégales) on constate, paradoxalement, qu’elles ne bénéficient pas d’un soutien social efficace. En fait, leurs attachements souffrent souvent d’un manque de réciprocité : elles apportent plus d’aide qu’elles ne reçoivent. La rumeur, par exemple, veut que 9 femmes sur 10 restent avec leur partenaire alcoolique, ce qui n’est pas le cas que d’un homme sur dix. C’est pourquoi l’alcoolisation des femmes se passe souvent dans une grande solitude.

Les causes de dépendance, pour les femmes, se situent également dans la problématique de l’identité et des rôles sociaux. Pour les hommes aussi d’ailleurs. Il est intéressant de noter tout de même qu’il y a eu, dans l’histoire, des comportements féminins addictifs qui n’ont pas été problématisés. Ainsi, au début du siècle, a-t-on vu de nombreuses femmes «modernes» se livrer à la morphinomanie sans qu’on s’en offusque outre mesure. Or c’est juste après qu’a commencé de se répandre ce que Louise Nadeau, la fameuse alcoologue québécoise, appelle «le mythe de la vraie femme». La femme n’a dès lors plus été représentée que sous les traits de la vestale gardienne du foyer, la mère, la soignante. À son cahier de charges, on a naturellement inscrit le bien-être de son époux, au point qu’on a pu dire que si un homme boit au bistrot, c’est que sa femme n’est pas capable de le retenir à la maison et qu’elle ne fait donc pas son travail de vraie femme. Transgresser ce rôle-là en s’accordant les plaisirs de la boisson, voire de l’ivresse, c’est une trahison. C’est ce que Louise Nadeau, nomme «la transgression des dames de cœur». C’est à partir de là que la culpabilisation des femmes consommatrices d’alcool est devenue très forte. Comme le disait un ministre de la santé du Québec: l’ivresse, chez l’homme, ce n’est pas beau à voir, mais chez une femme «c’est carrément répugnant».

C’est souvent par refus de ces rôles prescrits que les femmes se sont mises à boire ou à consommer des drogues. Le changement des mœurs et l’émancipation, contrairement à ce qu’on pourrait croire, n’ont pas arrangé les choses. Or ces anciens rôles se sont dévalorisés, enfermant par exemple les femmes au foyer dans des conflits d’identité encore plus difficiles qu’auparavant.

Les cibles de la société de consommation

Les représentations véhiculées par la société de consommation, en particulier par la publicité, peuvent sérieusement aggraver le désarroi de nombreuses femmes et les inciter à la consommation. On peut noter par exemple que la publicité pour les médicaments s’adresse principalement aux femmes. En consommer peut être l’indice d’un hyperconformisme par rapport à l’image de la femme fragile et dépendante, mais aussi, à l’inverse, d’un refus des images traditionnelles (dans ce cas, la consommation serait une manière de transgresser la prescription médicale et sociale et de reprendre le pouvoir sur soi et sur son propre corps).

Nous nous sommes donc intéressées à la réponse que la société apporte aux problèmes de santé des femmes, et avons constaté que le diagnostic médical ainsi que la «médicalisation» de la vie des femmes contribuent à accroître leur consommation. Très souvent, les difficultés des femmes sont interprétées comme un défaut de santé, et au lieu de les attribuer à des circonstances collectives liées à un statut social et professionnel défavorisé, on en fait une insuffisance individuelle. Un exemple intéressant nous est fourni par ce qu’on a appelé des «hystéries de masse». Il s’agit de malaises constatés chez des femmes travaillant dans des ateliers, manifestés par des maux de tête, nausées, maux de dos etc. On a d’abord cherché l’explication du côté de la biologie en attribuant ces phénomènes aux périodes menstruelles, qui, chez des femmes qui sont toujours ensemble, auraient une certaine synchronicité. En tout cas, on a posé avec une quasi-certitude qu’il s’agissait de symptômes psychogènes, qui pouvaient également provenir de la manière des femmes de somatiser le stress, car elles n’auraient pas la même capacité que les hommes de le gérer et de le surmonter. Il est plaisant de relever qu’un phénomène semblable étant advenu à un groupe d’hommes, on n’a pas parlé d’hystérie de masse, mais «d’encéphalomyélite myalgique bénigne»! De fait, on peut faire l’hypothèse que ces malaises seraient dus non pas à des phénomènes psychiques, ni à un agent toxique clairement détecté, mais à une accumulation de nuisances agissant en interactions.

Plusieurs exemples montrent que l’attitude des médecins face aux troubles décrits par les femmes diffère de celle qu’ils adoptent avec les hommes. Les investigations diagnostiques sont moins poussées et moins techniques, les traitements plus longs, orientés davantage vers des médications et des thérapies plus généralistes et moins spécifiques.

Une enquête faite à Genève dans une consultation de quartier indique que les médecins (y compris les femmes) prescrivent des psychotropes aux femmes trois fois plus souvent qu’aux hommes. Il y a des raisons de penser que face à des femmes souffrant de problèmes d’alcool, certains médecins restent tout autant inadéquats et «généralistes» dans leur diagnostic. Nous connaissons des cas précis où l’alcoolisme n’a jamais été mentionné et où la consultation s’est conclue par des prescriptions de médicaments psychotropes.

Traitements et prises en charge

Qu’il s’agisse de drogue ou d’alcool, les femmes sont nettement sous-représentées dans les institutions de traitement résidentielles. En principe, 85% des institutions sont ouvertes aux femmes, mais jusqu’à ces dernières années, certaines régions n’offraient strictement rien aux femmes dépendantes. De manière générale, peut-être parce qu’elles ne se retrouvent qu’en petite minorité au milieu des hommes, les femmes ne choisissent pas d’abord les traitements résidentiels et privilégient les aides ambulatoires non spécialisées. Elles sont confrontées, de plus, au lancinant problème des enfants, car elles craignent qu’on leur en retire la garde si elles demandent de l’aide et avouent leurs difficultés.

Ces dernières années, quelques lieux d’accueil et/ou de prise en charge réservés aux femmes se sont ouverts en Suisse, mais ils n’ont pas eu le succès escompté et la plupart ont déjà fermé. Nous continuons pourtant à penser qu’une offre spécifique pour les femmes se justifie, même s’il s’agit d’une offre partielle, à l’intérieur d’une structure mixte. En effet, on constate que dans les groupes mixtes, les femmes ont plus difficilement la parole et pas sur les sujets qui les concernent directement. L’une d’elles racontait récemment que dès qu’elle prend la parole dans son groupe d’entraide les hommes regardent leur montre… Que ce soit vrai ou non, le fait est qu’elles ne se sentent pas valorisées, ou alors il faut reprendre les jeux de séduction qui leur ont si peu convenu jusqu’ici. De plus, le traitement d’une dépendance ou d’une toxicomanie implique souvent un parcours régressif vers les traumatismes des premières années de la vie. Sur ce chemin, les femmes rencontrent souvent des histoires d’abus sexuels ou de violence qu’elles vivent avec une image d’elles-mêmes si dégradée qu’il est presque impossible de le faire sous le regard des hommes.

Quelques perspectives préventives

Au terme de ce survol de la question des spécificités féminines dans la consommation d’alcool et d’autres drogues, on ne peut qu’esquisser quelques pistes pour la prévention. Notre groupe de travail s’efforce de définir les axes d’une prévention primaire pour les filles en tenant compte des caractéristiques observées et présentées ici.

Compte tenu de la situation de dépendance affective souvent constatée, une des stratégies devrait porter sur la question des attachements, en mettant l’accent sur la réappropriation de soi. La vocation d’aider les autres et de se consacrer au bien-être des proches n’est pas une qualité à encourager chez les jeunes filles. Si l’on doit valoriser leur capacité de créer des liens et de constituer un réseau social, il faut les mettre en garde contre les dangers de la codépendance et l’aliénation de leur autonomie. L’objectif de la prévention pourrait être défini en termes de pouvoir, un pouvoir défini comme la capacité d’avoir prise sur son destin et de se construire dans un processus d’identification à long terme. Pour terminer sur une note optimiste, on soulignera la force et le courage des femmes qui s’engagent souvent avec beaucoup de détermination dans une recherche d’authenticité et de clarification des rôles. Si ce processus doit être soutenu, il faut autant que possible qu’il ne fasse pas le détour par la consommation de produits qui, si elle aide parfois à voir clair et à dire non à l’inacceptable est par trop destructrice de l’estime de soi. Or la conscience et l’estime de soi de la mère font la force des générations futures.

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  1. Actuelle plate-forme romande Femmes, dépendances.[↑]
  2. Monique Bolognini, colloque Femmes, dépendances, 27 avril 1997.[↑]
  3. ISPA/OMS, enquête sur la santé des éco- liers de 11-16 ans.[↑]
  4. Daniel Cordonier : « Événements quotidiens et bien-être à l’adolescence », Edition Médecine et Hygiène, Genève 1995.[↑]
  5. Etienne Maffli, catamnèse sur le devenir des patients alcooliques après 7 ans. ISPA, 1996.[↑]

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