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  1. Page d’accueil
  2. Dépendances
  3. Dépendances 10
  4. Un parcours thématique

Enjeux sociaux de l’accompagnement des toxicomanes
Anne Dentan (Re’lier)
À chaque dépendance son médicament?
Dr Jacques Besson (Division d'abus de substances)
« Il n’y a pas de problèmes, il y a des solutions »
Lucky, interview recueilli par Marie-José Auderset, ISPA
Prescription d’héroïne: une combinaison nécessaire d’approches diverses
Nicole Stutzmann (OFSP), Martin Hosek (OFSP), Philippe Lehmann (OFSP)
Le renard et la cigogne ou la collaboration entre médecins et travailleurs sociaux
François Pilet (médecin généraliste)
Un parcours thématique
Christophe
La méthadone, un levier important pour une prise en charge efficace des héroïnomanes
Jean-Jacques Déglon, médecin-directeur de la Fondation Phénix à Genève

Dépendances 10 - Médicaliser les dépendances: des effets secondaires?: Un parcours thématique

avril 2000

Un parcours thématique

Christophe

Pour les toxicomanes, le retour à l’abstinence est un processus long, sinueux et personnel. Chaque trajectoire est différente: les besoins, les possibilités, les écueils, les ressources et les faiblesses varient d’une personne à l’autre. En même temps, chaque homme et chaque femme qui vit la dépendance au quotidien se trouvent confrontés à une problématique similaire. C’est en tenant compte de ces différences et de ces ressemblances que les professionnels travaillent: ils sont empreints des connaissances actuelles sur les toxicomanies et tentent d’avoir, dans le même temps, un regard neuf avec chaque client, chaque patient. A ce titre, le témoignage de Christophe, comme celui de Lucky, enrichissent la réflexion. (réd.)

J’ai aujourd’hui 25 ans et j’habite un appartement dans une ville de Suisse romande depuis environ une année. Cela fait maintenant bientôt un an que je n’ai plus reconsommé de drogues dites dures. J’ai commencé à fumer des joints à l’âge de 12 ans, comme la plupart de mes copains. À 15 ans, j’ai vécu ma première expérience de consommation d’héroïne. J’habitais alors toujours chez mes parents. J’ai entrepris ma première cure de méthadone avant d’être arrêté; j’ai alors utilisé mon séjour en prison pour me sevrer. À ma sortie, j’ai rapidement replongé et ai écopé de 12 mois fermes. De 21 à 23 ans, j’ai passé, sevré, plusieurs séjours dans diverses institutions fermées.

Puis, pendant une année, j’étais en cure de méthadone et continuais à consommer régulièrement. J’attendais mon jugement et j’habitais dans mon appartement. J’ai pu bénéficier de l’article 44 CPS et je suis entré dans un foyer de réinsertion socioprofessionnelle ouvert, toujours en cure de méthadone.

Les rapports que j’ai pu avoir avec le monde médical étaient liés à la cure de méthadone que mes différents médecins m’ont prescrite. J’ai donc vécu plusieurs expériences.

À 23 ans, lors de ma première cure, mon médecin de famille était plutôt complaisant. Il voulait tout d’abord que je prenne ma méthadone dans son cabinet. Je lui ai expliqué que je consommais de toute façon 9 jours sur 10, et qu’il serait inutile de faire des contrôles d’urine. Après négociation, on a convenu que j’irais chercher ma méthadone tous les 3 à 4 jours. En réalité, j’y allais quand je n’avais pas d’autre solution, et il jouait le jeu. Il avait compris que la méthadone me servait de bouée de secours, juste pour me tenir la tête hors de l’eau. Il n’exerçait aucune pression sur moi. Ce n’était pas du sérieux.

La méthadone a un effet pernicieux

La consommation d’héroïne, en plus de la méthadone, ne pose absolument aucun problème. Même une consommation massive n’entraîne pas de conséquence. Pour moi, il était plus difficile à me motiver d’arrêter de consommer lorsque j’étais en cure de méthadone. Avec un dosage élevé de méthadone, la consommation d’héroïne fait l’effet désiré, mais ne pose pas de problème, puisque la méthadone atténue ensuite le manque. Par contre, lorsque la dose de méthadone diminue et qu’une consommation d’héroïne survient, le consommateur ressent un manque massif, ce qui entraîne presque obligatoirement une augmentation de la dose de méthadone prescrite par le médecin. Dans l’optique “zéro”, on ne peut se permettre aucune consommation, même occasionnelle. J’ai toujours été contre la méthadone, c’est pourquoi je ne l’ai utilisée qu’en dernier recours, comme bouée de sauvetage.

J’ai aussi pu constater que la dépendance à ce produit est bien plus violente que celle à l’héroïne. En en prenant, on est tous les jours plus ou moins pété au moment de la consommation, et on est tous les jours plus ou moins en manque 12 ou 24 heures plus tard. On reste dans l’ambiance opiacés. Les symptômes sont les mêmes, t’es soit en manque soit pété, tu transpires pour un rien, les pupilles sont les mêmes, etc. Par contre, avec un dosage faible, je recommençais à être moi-même, les symptômes diminuaient. Mais il m’a quand même fallu près de 6 mois pour arriver à dormir à nouveau correctement.

Quand je suis arrivé dans l’institution ouverte, j’ai commencé à prendre ma méthadone dans un centre d’accueil dit à seuil bas. Ce n’était pas évident, car j’y rencontrais des gens qui avaient les mêmes problèmes que moi et il n’était pas rare de se fixer des rendez-vous pour se faire un extra. Après 3 mois, je suis allé chez un médecin privé en ayant la ferme intention d’entreprendre un sevrage progressif. Ce fut pour moi un pas supplémentaire important. Mon médecin m’a conseillé d’attendre un peu car, me disait-il, une cure de “métha” a plus de chance de réussir si elle dure entre 2 et 3 ans. Il disait se baser sur son expérience dans l’accompagnement de personnes toxicodépendantes et ne voulait pas que je me mette inutilement en danger.

Cette démarche me mettait mal à l’aise, car lorsque le médecin me demandait comment je me portais avec 1cc de moins, je ne pouvais pas lui avouer que j’en avais déjà enlevé 10 ou 15 depuis le début. Et même lorsque je suis arrivé à zéro, j’ai continué d’aller chercher ma dose à la pharmacie une fois par semaine, avant de la jeter dans les toilettes. Je voulais faire bonne impression à mon médecin, à la pharmacie et à la justice… Un jour, j’ai oublié d’aller chercher ma dose pour la semaine (dont je n’avais plus besoin depuis bien longtemps), et j’ai bien dû avouer à mon médecin que j’étais sevré. Depuis, on se voit encore environ une fois par mois, mais plus pour la “métha”.

Dans le centre d’accueil à bas seuil, une diminution comme je l’ai pratiquée était impossible, car je devais boire mon sirop régulièrement devant eux. Alors que je pouvais diminuer les doses quand je les prenais hors du contrôle médical, je ne pouvais pas le faire lorsque la cure se déroulait de visu. Et je ne pouvais pas diminuer un jour et augmenter le lendemain. Le contrôle me forçait à garder toujours le même dosage.

Le rôle de la justice

Comme dit plus haut, je suis sous le régime d’un article 44 CPS. Je dois dire aujourd’hui que cette pression judiciaire a été pour moi un électrochoc et a eu un effet stimulant sur ma démarche de réinsertion. Je ne pouvais m’imaginer retourner en milieu carcéral.

Pour le shit, c’est différent, parce que la dépénalisation de sa consommation est déjà presque acquise. Je suis tout de même inquiet du service de livraison à domicile du shit que tu trouves via le net. Même si cela va peut-être mettre un frein au commerce de rue qui confronte l’acheteur à plein d’autres produits qu’il n’aurait pas achetés.

Les institutions sociales

Les institutions apportent obligatoirement quelque chose de positif, ne serait-ce que l’expérience de non-consommation. Dans chacune d’elles, j’ai découvert que j’étais capable de ne pas consommer d’héroïne. Je pouvais vivre sans, et c’est souvent déjà un grand enseignement. De plus, elles m’ont permis de reprendre conscience de mes capacités physiques. Mon parcours dans les institutions, je le vois un peu comme des petits sauts de puces. J’ai avancé étape par étape, en glanant ici et là ce que je pouvais. Au niveau de la consommation, j’ai connu celles où la consommation n’est tout simplement pas possible. C’est pas toi qui décides si tu veux consommer ou pas, car c’est interdit, et de toute façon tu ne sors pas. Il y a également celles où tu peux sortir et où c’est à toi de décider si tu veux consommer ou pas. Là, tu n’es pas forcé d’arrêter, tu n’es pas contrôlé; c’est à toi de décider.

Les institutions n’apportent pas toujours que du positif, notamment lorsqu’il n’y a plus qu’à mettre les pieds sous la table. Ce n’est pas nous rendre service que de distribuer le ticket pour le match de foot, l’entrée à la piscine et le billet de cinéma. En plus, la sortie d’institution est souvent un passage difficile à négocier, car tu te retrouves soudain seul dans ton petit appartement, face à tes problèmes et à tes responsabilités. C’est souvent l’effet pervers des institutions. Quand j’ai quitté les institutions fermées que j’ai fréquentées, d’un jour à l’autre je ne revoyais ni les éducs, ni les pensionnaires. Ce n’était pas évident.

En sortant du foyer ouvert où j’ai fait un séjour de 9 mois, j’ai continué, à ma demande, d’être suivi à l’extérieur. Et le réseau que j’ai mis en place avec l’institution fonctionne encore aujourd’hui.

Gérer les rechutes

La rechute est abordée de manière très différente d’une institution à une autre, et également d’un médecin à l’autre. Il y en a peu qui, à mon avis, discutent intelligemment de la rechute. J’ai connu l’institution qui sanctionne sans se préoccuper de l’évolution et du contexte. Dans un service médico-social, on constatait simplement que certaines prises d’urine étaient positives, sans plus.

J’ai toujours eu de la peine à parler de mes rechutes. J’ai une multitude de personnes avec lesquelles je peux en parler, mais lorsqu’elles se produisaient, je n’avais pas envie d’en parler.

Je n’y arrive pas; j’aime bien parler quand tout va bien. Les psys que j’ai rencontrés, je les voyais 5, 6 fois, mais je ne pouvais pas aller plus loin, je louvoyais. Si vraiment je venais à retraverser une période de rechutes, je m’adresserais en premier lieu à mon médecin pour trouver de l’aide.

Les envies de consommer n’ont pas totalement disparu et je ne peux pas affirmer que je m’en suis sorti une fois pour toutes. Je garde les pieds sur terre. Si je ne consomme plus, c’est en grande partie parce que je sais que je serai mal. Je n’ai plus de méthadone pour compenser le manque, alors je serai malade comme un chien. Sans méthadone, il est impossible de se dire “juste un p’tit”.

Avec les projets qui se mettent en place, il est de plus en plus facile de résister. Avec le temps, il n’y a plus besoin de dire non, car ça devient logique. Le tout est de conserver mes plaisirs, de maintenir ce que j’ai mis en place, comme le fait de boire un verre sur une terrasse, de lire un bouquin.

La solitude

Lors de mon dernier séjour en institution, j’ai eu la chance de rencontrer une pensionnaire du foyer avec qui j’ai emménagé. Nous nous sommes séparés par la suite, mais cette liaison nous a permis de nous soutenir et d’éviter une trop grande solitude à la sortie. Je déteste me retrouver seul, et je sais que c’est mauvais pour moi. D’ailleurs lorsqu’elle m’a quitté, je venais de perdre mon job et me suis posé la question de savoir ce qu’il me restait. À une vitesse grand V, je me retrouvais seul. Alors je me suis dit que j’avais au moins mon appartement. Comme j’ai besoin qu’il y ait de la vie autour de moi, j’ai immédiatement recherché un colocataire. Aujourd’hui, cette cohabitation se passe très bien et en plus j’ai retrouvé un travail.

Lorsque tu sors d’une institution, si t’es seul, tu galères. Il était important pour moi d’avoir quelqu’un qui porte les problèmes avec moi, qui soit là pour m’aider et me conseiller. Le soutien administratif a été très important pour moi, et je suis content d’avoir pu commencer à me remettre à jour dans l’institution. Le jour où tu reprends un appart, tout te tombe sur le coin de la figure. Alors mieux vaut y être préparé et avoir anticipé.

La place du travail

L’élément déterminant pour moi a été de retrouver un boulot qui me plaisait. Si le boulot m’ennuie, j’ai tendance à m’accorder des « compensations”… Par contre si le boulot me plaît, je suis heureux lorsque je rentre chez moi. Dans ce contexte, une consommation casse l’esprit positif de la journée!

Le plus important n’est pas l’aspect financier, mais bien le fait que je puisse trouver un plaisir que jusqu’ici je ne trouvais que dans l’héroïne. C’est triste à dire mais rien que le fait d’avoir un appartement, d’avoir le plaisir de l’entretenir, ça m’apporte de la satisfaction. J’ai eu la chance de pouvoir prendre à cette époque mon boulot pour un loisir, même si ce n’était financièrement pas rentable. De toute façon je n’ai pas besoin de beaucoup d’argent, car je n’ai jamais su comment le dépenser… en dehors de la dope. Pour la petite histoire, il m’arrivait en période de consommation, de me rendre à Zurich avec des copains pour acheter de la dope avec 1’000 francs en poche et de nous dire que si au moins on avait Fr. 4.50 de plus, on pourrait acheter des cigarettes.

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