octobre 2005
Selon l’Office fédéral de la statistique, les Suisses vivent toujours plus vieux. L’espérance de vie à 65 ans des hommes est passée ces dix dernières années de 15,51 ans à 17,12 ans et celle des femmes de 19,72 ans à 20,88 ans (Le Temps, 29 septembre 2005).
Parmi ces personnes, on estime entre 6 et 10% la proportion de celles et ceux souffrant de dépendance à l’alcool, sans compter celle liée aux médicaments et aux autres drogues.
Que l’on se tourne du côté des professionnels du champ des dépendances ou de ceux gravitant autour de la personne âgée, le constat est le même: on est conscient du problème et de son ampleur croissante, mais on est démuni quant aux réponses à donner pour une prise en charge adéquate des personnes concernées. Les ponts entre les domaines de la gériatrie et de la dépendance font encore défaut. Pourtant, les textes qui forment ce numéro le montrent, il est tout à fait valable d’entreprendre une démarche de soin à un âge avancé. Le 17 novembre prochain, lors de la Journée de solidarité avec les personnes touchées par l’alcool, c’est le message que diffuseront les professionnels en sensibilisant le grand public à ce problème largement occulté, et cela pour différentes raisons: d’une part, la personne âgée est souvent en marge, n’ayant plus de vie professionnelle et une vie sociale plus restreinte. Cette place discrète dans la société rend les problèmes de consommation moins visibles et en apparence moins problématiques. De plus, quand la personne âgée est dans une démarche de soins, il n’est pas toujours aisé d’établir des critères significatifs pour diagnostiquer une dépendance (chutes, dépression, etc. sont courantes à cet âge-là). D’autre part, les offres de traitement dans le domaine des dépendances sont souvent peu adaptées à des hommes et des femmes nécessitant souvent d’autres prises en charge… alors que dans les institutions pour personnes âgées, il nous a été répondu qu’il n’y avait pas de problème de consommation dans l’établissement.
S’attaquer à cette problématique donne l’impression de se retrouver face à un angle mort, comme un reflet de la difficulté de notre société à accepter notre finitude. Pourtant, sans notre condition de mortels, que serait la vie? Se pencher sur les problèmes de dépendance de nos aînés, c’est aussi l’occasion, parmi d’autres, de changer le regard souvent négatif porté sur la vieillesse, cette période charnière qui questionne notre rapport au temps, à la relation, à la vie et à la mort.
Corine Kibora (ISPA)