septembre 2002
La codépendance. Phénomène que nous traitons, en général, en termes interindividuels : une personne est malade et son entourage cache le problème ou, pire, lui procure directement ou indirectement le ou les produits, assume les éventuelles dettes ou pare aux handicaps dus à l’addiction. Depuis plusieurs années, nombre de thérapeutes se préoccupent de cette question. Groupes d’entraide, de proches, thérapies de famille sont proposés pour travailler sur les codépendances. Dans ce numéro, vous pourrez prendre connaissance de diverses expériences et points de vue différents sur cette question.
Mais nous n’avons pas voulu en rester au rapport entre la personne dépendante et son entourage. Nous avons aussi cherché à savoir si les normes sociales et le type de vie que nous propose la société actuellement ont une influence sur la consommation de stupéfiants et, partant, ne deviendraient pas, en quelque sorte, codépendantes ou tout au moins acceptantes d’un certain nombre de comportements menant vers l’addiction. Plusieurs auteurs ont accepté de relever ce défi. La population suisse – particulièrement en ville –, et notamment par les démarches de réduction des risques, accepte un peu mieux que les phénomènes de dépendances soient devenus plus visibles et fassent donc partie du paysage social. Les exigences de performance, la concurrence et la consommation effrénée ont accentué la prise de produits permettant de rester jeune, dans le coup et compétitif : M. Véléa, psychiatre, émet donc l’hypothèse que certaines consommations de produits psychotropes seraient plus intégratives qu’excluantes. Du côté de l’école, le rapport des élèves au savoir et à l’institution passe actuellement, d’abord, par la satisfaction des besoins individuels. En découle, sans doute, un rapport différent aux psychotropes. Entre les messages de prévention et les besoins de l’économie, il y a un fossé qui s’agrandit. La question reste de savoir comment «Monsieur-tout-le-monde» intègre ces contradictions.
Toutes ces réflexions fort intéressantes ne répondent évidemment pas à la question posée mais démontrent en tout cas, si cela était nécessaire, que le rapport aux stupéfiants se modifie. A nous de voir comment nous devons nous adapter à ces nouvelles normes.
Gérald Progin (secrétaire général du GREAT)