Google rend difficile la publicité des services d’aide aux personnes en situation d’addiction

29.11.2023

Un rapport mandaté par l’OFSP met en lumière les limitations rencontrées dans la diffusion d’annonces via Google Ads pour la promotion de services d’aide aux personnes en situation d’addiction.  Les restrictions de Google Ads rendent difficile, voire impossible, la diffusion de publicités pour ces services, créant ainsi une inégalité avec d'autres secteurs et industries. Ce rapport explore d’autres alternatives publicitaires qui présentent toutes néanmoins des limites.  


Pour l'Office fédéral de la santé publique (OFSP), Feinheit, une agence de marketing et de communication, a présenté un rapport détaillé sur la limitation actuelle de Google Ads en matière de promotion des services d’aide aux personnes en situation d’addiction.  

Google Ads est une plateforme publicitaire en ligne, développée par Google, qui permet notamment aux annonceurs de diffuser des contenus sponsorisés dans les résultats de recherche de Google. Ce rapport part de la constatation que diffuser des Google Ads dans le domaine de la prévention et du soutien aux personnes en situation d’addiction s'avère difficile, voire interdite, dans plusieurs pays, dont la Suisse. Les limitations mises en avant dans ce rapport sont notamment :  

  • Les restrictions pratiques qui empêchent toute campagne payante via Google Ads contenant le mot "dépendance".  

  • Le fait que les annonceurs spécialisés dans les addictions doivent être certifiés par Google avant de pouvoir diffuser des annonces de leurs services. Cependant, cette certification n’est pas disponible en Suisse. Elle n’est en réalité disponible que dans quatre pays : l’Australie, l’Irlande, la Nouvelle-Zélande et les États-Unis.  

Le rapport souligne également qu’il n'y a aucune raison explicitement donnée de la part de Google quant à ces restrictions. Selon le rapport, cette décision découlerait d'une enquête de The Verge (2017) qui a montré que la publicité pour ces services amenait souvent à des désintoxications inappropriées, notamment en lien avec la crise des opioïdes aux États-Unis.

Tout cela met donc en avant que la manière dont Google gère actuellement les annonces publicitaires discrimine fondamentalement les organisations de santé et médico-sociales par rapport à des entreprises et industrie, et notamment celles liées aux substances et comportements addictifs. En effet, les contenus publicitaires liés à l’industrie de l'alcool par exemple ne demandent pas de processus de certification et bénéficient donc d'une plus grande liberté publicitaire. 

Les recommandations d'action pour les organisations de promotion et de prévention de la santé faites à la fin de ce rapport sont les suivantes :  

  • Les organisations peuvent se passer de Google Ads en privilégiant la visibilité organique (non payante), mais cela nécessite des ressources importantes et peut intensifier la compétition. De plus, cette méthode ne parvient pas à cibler efficacement les personnes ignorant leurs besoins d'aide. Or, ce sont précisément ces dernières que l'on vise généralement avec les campagnes de prévention. 

  • Pour la prévention des addictions, des canaux alternatifs tels que les réseaux vidéo locaux ou les réseaux sociaux peuvent être utilisés, bien que ces plateformes aient parfois également des restrictions et entraînent des compromis dans le ciblage spécifique des publics cibles. 

  • Il est également recommandé de créer une plateforme d'échange pour partager les connaissances entre les organisations spécialisées. 

Ce rapport expose donc la contradiction entre ces limitations et la Stratégie nationale addictions (2021-2024). Face aux restrictions de Google Ads, les organisations de promotion et prévention de la santé sont ainsi incitées à explorer des alternatives, même si celles-ci impliquent des compromis, de plus grands moyens financiers et des risques de visibilité plus basse.  

En conclusion, les organisations spécialisées dans les addictions exigent plusieurs choses de la part de Google :  

  1. Elles réclament des règles claires pour l'utilisation de Google Ads, critiquant l'ambiguïté actuelle et réclamant une explication sur le traitement préférentiel accordé à l'industrie. 

  2. Elles proposent une première position indépendante de l'algorithme dans les résultats de recherche, avec des liens vers des sources officielles pour les termes de recherche liés à la prévention des addictions.  

  3. Elles demandent la possibilité pour les organisations suisses de se certifier pour utiliser Google Ads. 

  4. Et de se séparer les systèmes d'enchères entre les organisations d'assistance aux personnes dépendantes et l'industrie, évitant ainsi l'augmentation des coûts pour l'assistance et la prévention des addictions due à la concurrence de l'industrie.