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Communiqué: Le Conseil fédéral est-il en train de tuer les essais pilotes cannabis?

01.04.2021

Le Conseil fédéral a rendu public les réglementations des projets pilotes cannabis. La densité des règles à suivre, tout comme l’accent mis sur la sécurité psychiatrique, risquent de rendre ces projets caducs. Alors que la Confédération ne paie rien pour ces essais, elle surcharge un bateau déjà rempli à ras bord et noie les villes sous la bureaucratie, au lieu de les encourager dans la recherche de solutions innovantes. Les professionnels des addictions sont inquiets et demandent au Conseil fédéral la plus grande souplesse dans l’application de ces normes, pour retrouver le sens de la collaboration avec les villes.

Le 24 septembre 2020, le parlement a décidé de laisser les villes développer des modes de régulation du cannabis, sous la forme d’essais pilotes. Il répondait ainsi à une demande des villes, lassée notamment par le deal de rue et les problèmes de produits coupés. Ce geste nécessaire, salué par tous, retrouve le chemin du pragmatisme de la politique drogue helvétique. Cependant, les règles que la Confédération impose aux villes mettent en danger le but même de ces essais, principalement pour deux raisons :

1. La sur-réglementation tue l’innovation : Soucieux de couvrir toutes les objections de toutes les parties, la Confédération a produit un catalogue de règles et de contraintes d’un volume impressionnant. Le Conseil fédéral semble vouloir tout contrôler depuis Berne, sans laisser les autorités locales gérer leurs affaires et sans même les appuyer. Malheureusement, une pareille densité normative aura des conséquences sur l’intérêt de ces projets. Face à des problèmes concrets, les acteurs des villes savent trouver des solutions innovantes par la concertation, l’expérimentation et un esprit orienté vers les solutions.

2. La pathologisation éloigne la majorité des consommateurs : Ces essais doivent nous permettre de mieux comprendre la régulation souhaitable du marché du cannabis pour l’ensemble de la société. Or, le Conseil fédéral se concentre sur les consommateurs les plus problématiques, afin de pouvoir dépister toutes les personnes avec des difficultés. Cette priorité à la psychiatrie demande la mise en place d’un suivi très resserré sur les personnes qui risque de nous priver d’une partie importante de la population. Des mesures intrusives peuvent éloigner les consommateurs peu ou pas concernés par des problèmes judiciaires ou les services offerts par le réseau addiction. La pathologisation de la consommation empêche d’avoir un regard global sur le marché et supprime une grande partie du potentiel et de l’intérêt de ce genre de projet. .

Les professionnels des addictions appellent la Confédération à faire preuve de discernement dans la conduite et la surveillance des essais pilotes. Au lieu de contrôler et surveiller, elle doit faire confiance aux villes pour trouver le compromis au niveau local, avec les acteurs impliqués (police, social, santé, éducation, etc.). Au lieu d’appliquer étroitement et de façon tatillonne les règles, elle doit soutenir les villes pour qu’émerge de ce partenariat l’opportunité unique de trouver enfin un chemin pour le cannabis, entre santé publique, ordre public, économicité et droits humains. Après la rigidité dans la production des normes, il est grand temps de montrer de la souplesse dans leur application. 

Contact : Jean-Félix Savary, secrétaire général, 079 345 73 19