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  4. L’approche psychodynamique à l’épreuve des addictions

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L’approche psychodynamique à l’épreuve des addictions
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Loïc Menneret (Service de médecine des addictions, CHUV)

Dépendances 71 - Soins infirmiers: L’approche psychodynamique à l’épreuve des addictions

décembre 2021

L’approche psychodynamique à l’épreuve des addictions

Nicolas Joost et Carine Maillard (Fondation de Nant)

Le modèle psychodynamique de la fondation de Nant offre un univers thérapeutique spécifique qui donne une place prépondérante à la personne et à son histoire. Les soins y occupent une place centrale, dont les différents aspects discutés.

L’histoire de la Fondation de Nant débute dans les années 40. Une famille de la Riviera vaudoise, qui faisait partie des assemblées dissidentes de l’Église réformée, a œuvré dans l’accueil des personnes atteintes dans leur santé mentale en leur offrant gîte, nourriture et soins. Ce mouvement allait totalement à l’encontre de ce qui existait en Europe à cette époque où la « folie » et la précarité étaient plutôt mises à l’écart de la société d’une manière ou d’une autre. « Être un interlocuteur » pour ces malades fut le point de départ de cette aventure humaine.

L’approche psychodynamique, découlant de cette histoire institutionnelle, permet aux soignants de mieux appréhender le lien qu’ils peuvent créer avec leurs patients, de manière bienveillante, en étant présents à leur côté, ni trop, ni trop peu. Un lien significatif qui peut leur permettre souvent de s’inscrire durablement sur le chemin du rétablissement psychique et addictologique. Cette conception du soin nous aide également à prendre du recul sur les événements et les comportements qui jalonnent une prise en charge. Les infirmiers doivent « survivre » au lien qui peut parfois être mis à mal par cette destructivité habitant ces personnes souvent hantées par de lointains traumatismes.

« Un des écueils de la prise en charge des patients addictés est la crainte de s’engager dans une relation transférentielle, dont ils sentent bien qu’ils pourraient devenir dépendants. Contrairement à une idée rependue, ces patients ne recherchent pas la dépendance mais au contraire, ils la fuient comme un danger, l’autre étant soit susceptible d’abandonner tôt ou tard, soit potentiellement empiétant »1.

Vignette clinique

Septembre 2012, je rencontre pour la première fois Océane, lors de sa première hospitalisation en milieu psychiatrique. A cette époque la patiente se trouve dans une grande souffrance psychique, ses consommations se limitent à du THC pris occasionnellement. Elle est admise pour son état dépressif et des angoisses importantes, avec des scarifications, idées suicidaires, impulsivité. Par la suite, Océane va sombrer dans la consommation de cocaïne, héroïne et drogues de synthèse. Il faudra quelques années chaotiques marquées par plusieurs hospitalisations en urgence et de longues traversées du désert avant qu’Océane adhère à un traitement psychiatrique puis addictologique. Désespérée, Océane n’a dès lors que la substance qui est assez puissante pour calmer sa souffrance et ses angoisses. Elle se met fortement en danger avec les injections et de multiples tentatives de suicide. Elle se montre peu compliante au suivi médical et ne fait confiance qu’à un infirmier qui assure une fragile continuité des soins entre les hospitalisations. La confiance s’installant, ce dernier parvient à l’amener en soin à l’unité de traitement des addictions. C’est à ce moment que je retrouve Océane en suivi infirmier, trois ans après notre première rencontre. Toujours peu compliante au suivi médical, les soins sont maintenus par les infirmiers, probablement moins menaçants pour elle. Le temps aidant, la confiance s’installe et l’alliance thérapeutique se consolide. Elle n’est pas réhospitalisée et parvient à maintenir une abstinence. Nous sommes deux infirmiers à assurer son suivi, se composant d’entretiens et d’approches corporelles. Océane commence à prendre plaisir à parler et surtout à prendre soin d’elle. Elle se montre moins réfractaire à rencontrer nos collègues médecins et la prise en charge s’étoffe avec desentretiens médico-infirmiers. Septembre 2021, les années sombres sont derrière et la destructivité a fait place à plus de sérénité et de confiance en la vie. Océane est stable et se reconstruit pas à pas. Neufs ans après cette première rencontre l’aventure se poursuit et le lien est toujours aussi fort.

La rencontre

Selon Dr Olivenstein, « la toxicomanie est la rencontre d’une personnalité, d’un produit et d’un moment culturel »2. L’enjeu, certes fragile, est de créer une nouvelle rencontre. Une rencontre entre deux personnes qui vont construire un lien significatif. La qualité de cette relation va permettre au patient de trouver un contrepoids au produit.

Le premier contact est déterminant pour initier ce lien de confiance. L’infirmière qui a accueilli Océane à l’UTA avait été sa référente trois années auparavant lors de son hospitalisation à Nant. Ce lien ainsi retrouvé a ouvert le chemin pour le reste de sa prise en charge. Océane a senti que nous étions désireux d’initier cette nouvelle rencontre et de lui offrir un accompagnement personnalisé.

Au travers de multiples balades accompagnées, d’entretiens infirmiers, d’échanges informels et des massages, nous avons pris le temps d’apprendre à la connaitre et comprendre son histoire. Il s’agissait de voir la personne entière avec ses ressources. Océane a senti que nous étions là pour elle, peu importe sa souffrance, son attitude, sa destructivité, elle pouvait s’appuyer sur nous.

Dans les moments de crise et de décompensation, il s’agit pour le soignant d’être suffisamment tranquille afin d’accompagner au mieux le patient. Nous nous appuyons alors sur les fonctions du milieu3 afin de prodiguer des soins adaptés et avoir une posture rassurante et contenante pour le patient. « Une souffrance est comprise quand elle est contenue », écrit Gunderson en 19784. Les patients expriment souvent leur mal-être au travers de leurs actes (violence, frustration, colère, menaces suicidaires). Face à ces mouvements de destructivité, le soignant doit savoir contenir et souvent se contenir. Il est nécessaire de ne pas répondre en miroir aux patients qui n’ont pas cette capacité de contenance. Il faut sortir de « l’action-réaction » en évitant de multiplier les changements de médication, de cadre, de prestations sociales etc. pour « soigner » nos propres sentiments d’inquiétude et d’impuissance que ces patients réveillent si facilement en nous.

Pour Océane, il a été nécessaire de poser un cadre et de mettre des limites pour lui offrir un environnement de soin rassurant et faire l’expérience d’une relation sécurisante. Malgré de nombreux rendez-vous manqués, des retards, des moments d’agressivité, nous sommes restés disponibles. Nous étions là pour elle, nous ne l’avons pas abandonnée. Nous l’avons accueillie sans jugement, de manière bienveillante et là où elle en était dans son histoire et dans son processus de soin. Mais le soin s’est aussi fait au travers d’une posture cadrante : savoir dire non, oser se fâcher, mettre les limites face à ses mouvements autodestructifs, etc.

Lorsque les angoisses, la tristesse, la colère, la frustration étaient trop présentes, que le dialogue n’était plus possible, nous avons également approché Océane par le corps. Des massages une fois par semaine l’ont aidée à se mobiliser et à se structurer mais aussi à se sentir validée et soutenue dans ses périodes de mal-être. La confiance s’en est alors encore renforcée. Il s’agissait d’être là pour elle quoiqu’il se passe, qu’elle sente qu’elle pouvait s’appuyer sur nous. Une simple présence, un regard bienveillant, une main rassurante, un sourire sincère et empathique ; le holding. Cet accompagnement fiable et structuré est très souvent une expérience nouvelle pour ces patients que la vie n’a pas épargnés. Océane a pu vivre cette expérience avec nous. Cette attitude, cette posture soignante, se basant sur l’approche psychanalytique, a permis la création de l’alliance thérapeutique et la réussite de cette prise en charge. L’approche psychanalytique demande aux soignants cette implication émotionnelle mais qui est ô combien nécessaire pour favoriser l’accroche en soins.

« Même s’ils ne guérissent pas, ils nous sont reconnaissants de les voir tels qu’ils sont, ce qui nous procure une profonde satisfaction »5.

À l’UTA, chaque patient a un infirmier et un thérapeute référent, qu’il soit médecin psychiatre ou psychologue. Le rôle de l’infirmier est essentiel puisque c’est lui qui accompagnera le patient tout au long de sa prise en charge ; en effet, les médecins suivent leur cursus de formation et ne restent en place qu’une année, deux dans le meilleur des cas.

Le soin psychique n’est pas qu’une question de relation directe avec le patient. Il est bien évident que c’est à travers ce lien que va pouvoir se créer une alliance thérapeutique, mais cette dernière ne justifiera pas le soin à elle seule. Dans notre unité, les prises en charge peuvent être très différentes les unes des autres avec des temporalités diverses, allant de quelques semaines à plusieurs années. Des patients sont en traitement depuis l’année de l’ouverture de l’unité soit 1998. Il convient donc aux soignants de s’adapter à la réalité et aux besoins des patients pour rester thérapeutiques. Les soignants sont le f il rouge, les garants du projet de soins. Aux infirmiers d’être autonomes, créatifs, innovants dans les prestations qu’ils ont à proposer.

En tenant compte du contexte et de la fragilité psychique des patients, plusieurs approches de soins existent : entretiens individuels, massages, relaxation, acupuncture auriculaire, balades, cafés thérapeutiques, visites à domicile ou encore soins somatiques. Tous ces soins proposés permettent aux soignants de rencontrer leurs patients dans des espaces différents et peuvent ainsi renforcer le lien thérapeutique.

« L’adaptation du soignant aux besoins du patient doit suivre pas à pas ses transformations psychiques»6.

Le manque de confiance en eux mais également en ceux qui les entourent sont des éléments qui se retrouvent dans bon nombre d’histoire de vie. Le soignant doit avoir la capacité d’aller à la rencontre du patient, de son histoire singulière quelle qu’elle soit. Il doit faire preuve d’empathie tout en prenant un certain recul sur les événements pour ne pas être envahi par la problématique du patient.

Dans une prise en charge d’une certaine durée, le risque existe que patient et soignant s’enlisent dans une relation où le sens thérapeutique se perd s’il n’est pas régulièrement questionné. Le travail de réflexion, d’élaboration garantit la pertinence du projet thérapeutique et du soin. Les espaces de colloques, de synthèses, de supervisions sont des outils importants pour essayer de prendre du recul sur ces situations, de mieux comprendre les écueils de la relation et mettre du sens sur la place que peut prendre le produit dans l’économie psychique des patients.

Le « faire-ensemble »

A l’UTA, nous croyons fort au modèle de soins ancré dans notre institution depuis sa création ; un modèle humaniste, basé sur l’autonomie de la fonction infirmière que ce soit dans sa réflexivité ou dans la réalisation des soins. La clinique addictologique où pulsion de vie et pulsion de mort se côtoient, est tellement complexe qu’il est important de mettre du sens sur ce que nous faisons, de mettre du sens sur nos actes et nos mots.

« Ce que cherche avant tout la personne addictée c’est, consciemment, la quête du plaisir et non pas le désir de se faire du mal » 7.

Dans un premier temps en tout cas, le plus important dans l’accompagnement de ces personnes fragilisées par leur histoire c’est de prendre plaisir à les accueillir et les écouter et d’être à leur côté à un instant de leur existence où elles prennent la décision d’entrer en soins et de se laisser aider. Dans un cadre thérapeutique « ferme et bienveillant à la fois » 8, nous devons adapter nos propositions thérapeutiques au rythme de nos patients. Ce qui compte, c’est d’être là, avec eux, le temps qu’il faut à l’atteinte de leur objectif, au gré des pérégrinations de la prise en charge.

Toutes les approches thérapeutiques actuelles ont le même but qui est celui d’offrir une palette d’offres la plus complète et la mieux adaptée possible. Nous nous nourrissons de ces différences, de ces choix multiples qui s’offrent à nos patients et à nous-mêmes. A nous d’en faire quelque chose et d’être suffisamment créatifs et innovants.

71_6_Lapproche-psychodynamique-a-lepreuve-des-addictions_Joost-et-Maillard_Dependances_2021.pdf
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  1. Audibert C. Préface. In : Ferenczi S. (ed). Sur les addictions. Paris : Petite Bibliothèque de Payot, 2008. [↑]
  2. Olivenstein C. La drogue ou la vie. Paris : Robert Laffont, 1983, p. 265-273.[↑]
  3. Gunderson J. Defining the therapeutic process in psychiatric milieu. Psychiatry 1978; 41: 327-335.[↑]
  4. Bion W. Aux sources de l’expérience. Paris : puf, 1979.[↑]
  5. Winnicott DW. Jeu et réalité. Paris : Éditions Gallimard, 1975.[↑]
  6. Ferenczi S. Sur les addictions. Paris : Petite Bibliothèque de Payot, 2008.[↑]
  7. McDougall J. L’économie psychique de l’addiction. Revue française de psychanalyse 2004 ; 68 : 511-527.[↑]
  8. Racamier P-C. L’esprit des soins. Le cadre. Paris : Éditions du Collège, 2002.[↑]

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