Dans une note politique datée de juillet 2025, l’UNODC revient sur un terme devenu courant dans les débats publics et juridiques : la « décriminalisation ». Bien que ce mot ne figure pas dans les textes des trois conventions internationales sur le contrôle des drogues, il est utilisé pour décrire les stratégies nationales qui visent à retirer les sanctions pénales liées à l’usage personnel de stupéfiants, sans pour autant légaliser ces pratiques.
S’appuyant notamment sur les cas de l’Italie et du Portugal, l’UNODC montre que certains pays ont transformé l’usage ou la possession de drogues en infractions administratives, excluant la réponse pénale. Ces approches, souvent accompagnées de dispositifs sociaux et médicaux, illustrent une volonté de traiter la consommation de drogues comme un enjeu de santé publique plutôt que comme une question de justice pénale. D’autres États ont choisi des formes de dépénalisation qui permettent d’alléger ou d’éviter les poursuites judiciaires, tout en conservant l’usage de drogues comme une infraction pénale sur le papier. L’UNODC souligne que cette approche est souvent confondue avec la décriminalisation proprement dite, qui, elle, retire complètement l’usage du champ pénal. Cette distinction, pourtant essentielle sur le plan juridique et en matière de droits humains, reste floue dans de nombreux débats publics.
Sur le plan du droit international, l’UNODC rappelle que les conventions de 1961, 1971 et 1988 n’imposent pas aux États de criminaliser l’usage de drogues à des fins non médicales. En revanche, elles les obligent à limiter ces usages aux seuls objectifs médicaux ou scientifiques. La convention de 1988 prévoit que la possession de drogues pour usage personnel soit érigée en infraction pénale, sous réserve des principes constitutionnels et juridiques nationaux — une clause de sauvegarde qui autorise des flexibilités. C’est dans cette marge que plusieurs pays ont légiféré pour éviter des sanctions disproportionnées ou inefficaces.
La note rappelle aussi que l’incarcération massive des personnes usagères de drogues, souvent atteintes de troubles de l’usage, engendre des coûts élevés pour les systèmes judiciaires et des effets délétères sur la réinsertion. L’UNODC préconise dès lors des mesures alternatives à la condamnation ou à la peine, comme l’orientation vers des soins, des programmes de prévention ou de réhabilitation.
Tout en soulignant la diversité des cadres nationaux, l’UNODC insiste sur la nécessité d’évaluer chaque politique dans son contexte local : système juridique, infrastructures de soins, réalités sociales et économiques. La décriminalisation ne constitue pas une obligation juridique internationale, mais elle peut, dans certaines conditions, contribuer à une réponse plus humaine, efficace et cohérente avec les droits humains.
Si cette prise de position de l’UNODC clarifie certains aspects juridiques et ouvre la voie à des politiques plus centrées sur la santé, elle reste en retrait sur plusieurs enjeux cruciaux, tels que les conséquences sanitaires de la répression (notamment sur le VIH), les disparités raciales, les critères de proportionnalité et les bonnes pratiques, notamment en matière de réduction des risques, dont les politiques peuvent jouer un rôle transformateur, à l’interface entre santé publique et droits humains, comme le souligne la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur le droit à la santé, Tlaleng Mofokeng. Par ailleurs, le document accorde une attention limitée à la dimension des droits fondamentaux, pourtant centrale pour d’autres institutions onusiennes comme le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, qui insiste sur l’urgence de réformer les politiques actuelles en matière de drogues.
Les États disposent d’une flexibilité juridique pour adapter leur réponse à la possession pour usage personnel, en fonction de leurs principes constitutionnels.
Les troubles liés à l’usage de drogues relèvent de la santé publique, et appellent des soins accessibles, fondés sur des données probantes, ainsi que des mesures favorisant le rétablissement.
Le terme « décriminalisation » recouvre des réalités légales variées ; son usage nécessite prudence et précision.
L’évaluation des politiques doit tenir compte du contexte socio-économique et des capacités en matière de soins.
L’UNODC soutient les États dans la mise en œuvre de mesures alternatives à la condamnation et la réduction des peines dans les cas appropriés.
Ces approches visent à réduire la surpopulation carcérale, éviter les effets négatifs des casiers judiciaires, et à favoriser la réinsertion.