Dépêche ATS
L'initiative populaire veut interdire la publicité pour le tabac dans la presse écrite, sur internet et les médias sociaux, les affiches, dans les cinémas et les points de vente ou lors de manifestations. Elle a été déposée en 2019 et est soutenue par une quarantaine d'organisations pour la santé.
L'interdiction concernerait donc aussi les publicités destinées aux adultes mais accessibles aux plus jeunes. La promotion et le parrainage en faveur des produits du tabac ne seraient pas autorisés non plus. Les cigarettes électroniques seraient réglementées comme les cigarettes traditionnelles.
L'objectif est de protéger les plus jeunes des conséquences graves du tabagisme sur la santé. Selon des études, plus d'un fumeur sur deux (57%) a commencé à fumer alors qu'il était mineur.
S'alignant sur le Conseil fédéral, le Conseil national a décidé mercredi, par 96 voix contre 84, de recommander le "non" à ce texte. Pour la majorité, issue des rangs de l'UDC, du PLR et du Centre, des mesures sont nécessaires pour protéger les jeunes, mais elles doivent être inscrites dans le cadre de la loi sur les produits du tabac que le Parlement examine encore.
Cette loi offrira un compromis pas trop éloigné de l'objectif majeur de l'initiative qui est d'interdire la publicité qui touche les jeunes et les enfants, a expliqué Benjamin Roduit (Centre/VS) au nom de la commission. C'est une solution pragmatique et raisonnable.
Le champ d'application de l'initiative est trop large, a poursuivi Olivier Feller (PLR/VD). Il s'agit d'une interdiction pure et simple de la publicité pour le tabac.
Ces mesures sont contraires à la liberté économique, a fait valoir Regine Sauter (PLR/ZH). L'industrie du tabac crée de l'emploi et elle doit pouvoir faire de la publicité comme les fabricants de tous les autres biens de consommation. Plus de 11'000 emplois seraient touchés, a renchéri Andreas Glarner (UDC/GL).
Gregor Rutz (UDC/ZH), président de la Communauté du commerce en tabacs, s'est lui inquiété des atteintes à des droits fondamentaux, à la liberté d'expression et d'informer. Ce n'est pas à l'Etat de dire à la population ce qui est bon ou non pour elle, selon lui. Cette initiative ouvre la voie à d'autres interdictions, dans le domaine de l'alimentation par exemple, a estimé Albert Rösti (UDC/BE).
Pour les partisans de l'initiative, la publicité a un impact réel sur la consommation de tabac. La cible idéale est la jeunesse, une population particulièrement réceptive et sensible aux modes, a affirmé Pierre-Alain Fridez (PS/JU). Entrer dans la consommation de tabac entraîne les risques élevés d'une consommation à long terme.
La santé des plus vulnérables est un bien commun à protéger, a poursuivi Michel Matter (PVL/GE). "Notre responsabilité est de les protéger", a ajouté Isabelle Moret (PLR/VD).
Chaque année, 9500 personnes meurent à cause du tabac en Suisse, a souligné Laurence Fehlmann Rielle (PS/GE). Ce produit rapporte 2,5 milliards de francs en impôts fédéraux et cantonaux, mais les coûts du tabagisme représentent le double.
Il est temps de lutter efficacement contre ce fléau, a affirmé Sidney Kamerzin (Centre/VS). L'initiative comble une importante lacune, a complété Christophe Clivaz (Verts/VS). La Suisse est le seul pays d'Europe à ne pas avoir ratifié la Convention de l'OMS contre le tabac.
Le Conseil fédéral espère renverser la vapeur grâce à la loi sur les produits du tabac. La publicité pour le tabac est l'un des principaux points d'achoppement. Actuellement, celle-ci n'est interdite qu'à la radio et à la télévision. Le Conseil des Etats a décidé d'étendre l'interdiction aux journaux et sites Internet consultés par les mineurs.
Pour le Conseil national, la publicité ne devrait être interdite que dans les supports destinés aux moins de 18 ans. Elle serait en outre largement interdite dans les cinémas et dans l'espace public, ainsi que sur les panneaux visibles depuis le domaine public.
Pour le reste, les deux Chambres soutiennent l'élargissement à toute la Suisse de l'interdiction de la vente de cigarettes aux moins de 18 ans ainsi que la base légale aux achats-tests visant à vérifier le respect des âges-limites.
Le dossier passe au Conseil des Etats.