Plateforme SELF : un soutien essentiel à l’autogestion cessera ses activités à la fin de l’année en raison de choix budgétaires

Face aux problématiques des maladies chroniques, dont les addictions, la plateforme SELF, lancée par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), a depuis 2018 offert un cadre important de soutien à l’autogestion. Bien que développé avec des moyens limités, le programme a su fédérer usager·e·s, proches, professionnel·le·s et autorités autour d’une vision commune : promouvoir l’autonomie et mieux répondre aux besoins réels des personnes concernées grâce à une concertation continue. Pourtant, cette initiative va s’arrêter fin 2025, victime de mesures d’économie qui interrogent sur la place donnée à ce type de programmes à long terme en Suisse.

Depuis sa création en 2018, la plateforme SELF, portée par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), s’est imposée comme un espace de référence pour promouvoir l’autogestion auprès des personnes confrontées à des maladies non transmissibles, aux addictions et aux troubles psychiques. Cette plateforme réunit autorités publiques, professionnel·le·s, usager·ère·s et proches dans une démarche participative de réflexion collective, en vue de co-construire des offres mieux adaptées, centrées sur l’autonomie et la capacité d’agir des personnes. Une initiative d’autant plus pertinente qu’historiquement les processus de décision en matière de santé ont été marqués par un certain paternalisme, marginalisant les vécus et les points de vue des personnes concernées et de leurs proches.

Au fil des années, de nombreuses organisations, à l’instar du GREA, ont suivi et participé de près aux réflexions et aux forums SELF. Ces échanges ont notamment permis d’avancer sur des thématiques clés dans le domaine des addictions, telles que l’implication des proches (voir news de 2021 à ce sujet), ou encore le principe d’égalité et de compréhension réciproque entre personnes concernées et professionnel·le·s (voir rapport de 2022 sur ces questions).

Plus récemment, la plateforme a mis l’accent en 2024 sur un point essentiel : la participation des personnes concernées à tous les niveaux du système de soins — du suivi clinique à la politique, en passant par l’organisation, la formation et la recherche — selon le modèle de Montréal, favorisant un véritable partenariat fondé sur la reconnaissance de l’expérience vécue comme expertise.

Or ces démarches, qui nécessitent un engagement sur le long terme et une concertation approfondie, sont aujourd’hui fragilisées par des contraintes budgétaires qui privilégient les logiques de court terme. La suppression annoncée de la plateforme SELF à la fin de l’année 2025, dans le cadre de mesures d’économies imposées par le Conseil fédéral et le Parlement, illustre une forme d’incompréhension des temporalités spécifiques à ce type de programme.

La plateforme SELF incarne un changement de paradigme déjà adopté dans plusieurs pays où l’autonomie et la participation active des personnes concernées sont placées au cœur des politiques de santé, à l’image du modèle de Montréal. Ce mouvement vers une prise en charge plus humaine et collaborative s’inscrit dans une dynamique largement saluée par les professionnel·le·s, chercheurs et chercheuses, et promue notamment par l’OFSP.

Pourtant, la suppression annoncée de SELF, dans un contexte de coupes budgétaires, envoie un message politique paradoxal, voire contre-productif : promouvoir l’autonomie et l’autogestion tout en supprimant les dispositifs qui les rendent possibles, c’est risquer de compromettre la qualité et la durabilité des interventions de santé publique.

Alors même que les maladies chroniques, les addictions et les troubles psychiques restent des défis majeurs, mettre fin à une initiative reconnue pour son approche innovante et humaine interroge. Comment espérer construire des politiques efficaces et pérennes si les investissements dans l’autonomie des personnes sont sacrifiés sur l’autel de la rigueur budgétaire ?