Les professionnels des dépendances ne peuvent accepter la remise en cause de la protection des personnes dépendantes
L’assurance invalidité se trouve aujourd’hui dans une situation difficile qui rend indispensable des réformes en profondeur du système actuel. La 5ème révision, acceptée par le Parlement propose une nouvelle direction qui comporte plusieurs points très positifs. Malheureusement, elle intègre également des éléments rédhibitoires qui obligent les professionnels des addictions à se rallier au référendum contre la révision de la LAI.
Pourquoi il faut refuser la 5ème révision
L’assurance invalidité joue un rôle important pour les personnes dépendantes. Les personnes en rétablissement d’une problématique de dépendances ont besoin d’un cadre qui leur permette de se reconstruire pour ne plus être à la charge de la société. Ce cadre leur est offert par la Loi sur l’Assurance Invalidité (LAI). Elle permet aussi à ceux qui ont vu leur handicap s’aggraver fortement de vivre dans des conditions minimales de dignité humaine. La 5ème révision vient remettre en cause une bonne partie de ces acquis. Bien que la philosophie générale que trace la révision soit la bonne, nous ne pouvons pas accepter les mesures qui portent atteinte aux droits fondamentaux des personnes. Nous ne devons pas abandonner notre devoir de solidarité auprès des personnes qui en ont besoin. Les points suivants sont particulièrement problématiques :
Remise en cause intolérable de la protection des données
Lors de l’ouverture d’une procédure AI (voulue le plus tôt possible), le secret médical (a fortiori le secret professionnel) est levé automatiquement. Lors de la procédure, les parties prenantes ont accès aux informations médicales du dossier, y compris les proches et l’employeur. Celui-ci a le droit de renvoyer son employé suite à la prise de connaissance de ces informations. On mesure dès lors le danger pour les personnes dépendantes (ou en voie de le devenir). Une réaction de peur de l’employeur est à prévoir, ce qui serait bien évidemment de nature à fragiliser la personne qui tente de lutter contre sa dépendance, et à augmenter les risques de péjoration de la situation. On court aussi le risque que certains n’entrent pas en contact avec le réseau de soins, de peur que cela ne les « dénonce » auprès de leur employeur (ou de leurs proches) dans le cadre d’une procédure AI.
Influence négative sur les succès de traitement des addictions
L’objectif de réduction de 30% du nombre des rentes sera atteint essentiellement avec les handicapés psychiques. Les personnes dépendantes sujettes à une décision AI verront forcément leurs chances d’obtenir une rente très fortement réduites. On prend le risque de rendre beaucoup plus difficile le travail de réinsertion. En effet, aujourd’hui, les sorties d’institutions dépendances, et les efforts de réintégration sociale qui les accompagnent, se font souvent par le biais d’une situation stabilisée avec des mesures AI (rentes) et des activités protégées. Dans un cadre stable, la personne arrive à trouver un rythme qui lui permet de se reprendre en main, mais non sans peine. La suppression de la rente AI vient compliquer les conditions de cette sortie et péjore donc les chances d’offrir des perspectives de réhabilitation pour les personnes fortement touchées par une problématique de dépendances. On prend le risque alors de voir la personne retomber dans son addiction, car on sait aujourd’hui que les conditions de sortie du traitement sont un des facteurs essentiels de succès.
Un accès différencié aux mesures, selon le revenu des personnes
Pour avoir droit aux mesures, mieux vaut être riche que pauvre. Voilà le triste paradoxe de la révision. En effet, pour avoir droit aux mesures, le calcul d’exigibilité prend en compte la perte économique supposée, basée sur l’échelle suisse des salaires (perte supposée de gain par rapport à l’emploi antérieur). Une personne ayant un emploi mal rémunéré aura alors moins de chances de bénéficier de mesures. C’est pourtant dans cette catégorie que les problèmes sont les plus nombreux. Les points positifs qu’il faudra reprendre dans la future révision Malgré la situation dramatique des comptes de l’AI, le GREAT se trouve donc dans l’obligation de refuser cette révision qui ouvre des brèches dans le statut de la personne que nous ne pouvons simplement pas accepter. Par contre, nous saluons un virage pris par cette révision sur plusieurs points. Le GREAT demande donc, en cas de succès du référendum, que ces éléments soient au plus vite repris par le Parlement. Il s’agit de l’objectif général de priorité de l’intégration sur la rente qui est clairement énoncé ; de la mise en place de mesures (et de moyens) pour favoriser l’intégration des personnes dans le monde du travail ; de la détection précoce (agir tôt, avant que la situation ne se dégrade). Ces éléments consensuels aussi bien au Parlement (diminution des coûts) que dans les milieux socio-sanitaires (augmentation des perspectives des personnes) ne devraient pas poser de problèmes lors d’une révision ultérieure.
Le GREAT s’engage contre la 5ème
Au vu de ce qui précède, le GREAT s’engage donc à combattre la 5ème révision de la LAI. Il appelle tous ses membres, les personnes qui travaillent dans le champ des addictions, et plus largement la population générale qui se préoccupe de ces questions, à soutenir le référendum soumis à votation le 17 juin 2007.