L’Enquête suisse sur la santé (ESS) est une étude longitudinale représentative de l’Office fédéral de la statistique qui a lieu tous les 5 ans et permet de suivre l’état de santé de la population. L’ESS inclut des questions qui permettent de mesurer les comportements de jeu et classe les joueuses et les joueurs en trois catégories : « à faible risque », « à risque » et « pathologiques ». Les personnes avec un comportement de jeu à risque ou pathologique connaissent des conséquences négatives et/ou perdent le contrôle de leur pratique et sont donc concernées par un problème de jeu excessif. Si en 2017, 3,1% de notre population était concernée par le jeu excessif, ce chiffre se monte désormais à 4,3%, soit une augmentation conséquente, dans laquelle la part de jeu pathologique a plus que doublé (de 0,2 à 0,5%).
Le cadre légal sous tension
La nouvelle Loi sur les jeux d’argent (LJAr) est entrée en vigueur en 2019. Les objectifs de cette loi sont de protéger la population contre le jeu excessif tout en offrant des jeux attractifs : c’est pour cette raison notamment que les casinos suisses ont été autorisés à exploiter des sites de jeu en ligne. Depuis ce changement de loi, les professionnel·le·s de terrain observent et documentent un certain nombre de problèmes : l’augmentation et le rajeunissement des personnes qui sollicitent de l’aide, l’intensification du marketing pour les jeux, le développement rapide de l’offre numérique, les difficultés en matière de détection précoce et de protection des mineurs, etc. En parallèle, le produit brut des jeux n’a cessé d’augmenter, tout comme les interdictions de jeu. La publication des chiffres de l’ESS 2022 vient aujourd’hui confirmer les observations de terrain des professionnel·le·s du jeu excessif : l’addiction aux jeux de hasard et d’argent est en augmentation, et ce particulièrement chez les jeunes.
Des mesures correctives attendues
Sous prétexte de lutte contre le jeu illégal, l’offre de jeu en Suisse n’a cessé d’augmenter et de s’intensifier. La Suisse figure ainsi parmi les pays où l’offre de jeu est la plus dense au monde. Pourtant, la plus grande libéralisation du marché des jeux en Suisse semble s’accompagner d’une augmentation des problèmes de jeu : il semble donc risqué d’accuser les offres illégales d’être seules responsables des problèmes d’addiction. A ce titre, l’évaluation de la Loi sur les jeux d’argent, dont le processus a été initié par l’Office fédéral de la justice, est très attendue mais ne donnera pas de résultats avant fin 2026. Au vu de l’augmentation des problèmes de jeu, il devient urgent de corriger le tir. Le GREA recommande par exemple d’améliorer grandement le système de détection précoce des joueuses et des joueurs à risque ainsi que d’augmenter les moyens alloués à la prévention.
Contact : Camille Robert, co-secrétaire générale du GREA, c.robert@grea.ch, 078 891 39 41
Informations complémentaires
Les résultats de l’ESS de l’Office fédéral de la statistique peuvent être consultés à cette adresse : https://www.bfs.admin.ch/bfs/fr/home/statistiques/sante/enquetes/sgb.html