Malgré le soutien du courageux maire Jim Kenny, la fureur des habitants du quartier et le peu d'enthousiasme des autorités juriciaires auront eu raison du projet, du moins pour l'instant. L'ouverture prévue dans quelques jours annulée, la question reste sur la table, dans une ville ravagée par la crise des surdoses aux USA. Cette crise d'une rare intensité (plus de 4x la mortalité que nous connaissions en Suisse à l'époque du Letten) se déroule dans un pays ou l'accès aux système de santé reste très aléatoire pour beaucoup. La mise en place urgente de mesures de réduction des risques commence à convaincre de plus en plus de monde, notamment en s'inspirant de ce qui se fait en Suisse. Néanmoins, la résistance fondamentale à ces politiques de réduction des risques demeure et bloque les mesures à prendre, qui permettraient probablement de sauver de nombreuses vies.
Le débat actuel autour de l'ECS aux USA résonne avec ce que nous avons connu en Suisse dans les années 90, dans des proportions certes plus modestes. Comme en Suisse, les réactions fortes qui accompagnent l'arrivée d'un ECS nous montrent l'importance des démarches communautaires les plus inclusives possibles, afin de permettre aux citoyens du quartier concerné d'être entendus et impliqués dans le processus. Cette nécessité d'impliquer tout les acteurs au niveau local s'est progressivement installée en Suisse comme la bonne manière d'accompagner l'implantation de services de réduction des risques. La situation aux USA nous montre que ce chemin reste encore à faire de l'autre côté de l'atlantique. Il montre aussi que nous ne devons pas cèder un pouce dans le travail communautaire, au risque de retomber dans les excès que nous observons dans le débat à Philadelphie.