Allemagne : les conséquences d’une légalisation du cannabis mal planifiée

En Allemagne, la possession et la consommation de cannabis ont été autorisées avant l’ouverture des structures de vente et de production locale de cannabis : une approche qui entraîne des défis significatifs !

La RTS, dans un reportage du 15 octobre 2024, présente un premier bilan en demi-teinte de la légalisation du cannabis en Allemagne. Selon le média, nos voisins qui étaient autorisés à consommer du cannabis mais pas encore à en produire ou à en vendre légalement voient fleurir le marché noir.

Dès l’entrée en vigueur de la légalisation du cannabis en Allemagne, nous mettions en garde contre les risques liés à une mise en œuvre de la loi en deux phases (voir l’actualité du GREA du 04.04.2024, ainsi que l’article ci-dessous). En effet, la nécessité de vérifier la compatibilité avec le droit européen a conduit nos voisins à réagencer leur projet avec une mise en place progressive de la régulation: la consommation et la culture privée de cannabis sont autorisées dès avril 2024, c’est-à-dire trois mois avant l’autorisation de cultiver et de partager les récoltes dans le cadre d’un cadre juridique à but non lucratif (Cannabis Social Club). Dans l’intervalle, les consommatrices et consommateurs légaux ont été contraints de s’approvisionner sur le marché noir avec tous les risques que cela implique en termes de santé, de sécurité des produits et de financement d’organisations criminelles.

La Suisse compte s’y prendre différemment puisqu’elle prévoit une mise en œuvre coordonnée de la future loi sur le cannabis. En réponse à la légalisation de la consommation, le législateur suisse prévoit une régulation efficace et harmonisée de la production, de la distribution et de la vente de produits du cannabis. La possibilité pour les consommateurs suisses, dès le premier jour, de s’approvisionner dans des points de ventes agréés et spécialisés, offrant un cadre sûr et confortable, se fournissant auprès de producteurs autorisés et contrôlés par l’État constitue une forte incitation à acheter via des canaux légaux.

Enfin, comme le montre l’expérience du Canada qui constate un démantèlement important du marché illicite au cours des cinq premières années de légalisation à l’échelle nationale (le Québec mesure une diminution de 16% entre 2018 et 2020 de l’approvisionnement sur le marché illégal), assécher le marché noir est un processus qui prend du temps, et cela même lorsque la mise en œuvre est bien planifiée.