Le Conseil des droits de l’homme affirme son rôle dans les politiques en matière de drogues

Le Conseil des droits de l’homme de l’ONU a adopté début octobre 2025 une résolution historique sur les implications des politiques sur les drogues pour les droits humains. Cette quatrième résolution du genre marque un tournant : pour la première fois, le Conseil affirme son rôle autonome dans ce domaine, indépendamment des processus onusiens de Vienne et New York.

L’adoption par consensus de cette résolution intervient dans un contexte d’escalade des violations commises au nom du contrôle des drogues. Comme le rapporte l’International Drug Policy Consortium (IDPC), l’ambassadeur colombien a explicitement mentionné les récentes frappes militaires américaines en mer des Caraïbes pour justifier l’urgence de cette initiative. Portée par la Colombie et bénéficiant du co-parrainage de 35 pays dont la Suisse, la résolution entend renforcer le rôle du système onusien des droits humains face aux dérives de la guerre contre la drogue.

Les principales avancées de la résolution

  • Affirmation du leadership du Conseil : la résolution établit clairement que le Conseil des droits de l’homme a le mandat de promouvoir le respect universel des droits humains et que les politiques de drogues, étant donné leurs implications significatives, relèvent directement de ce mandat. C’est un signal fort adressé à la Commission des stupéfiants (CND) à Vienne.
  • Consolidation de la réduction des risques : le terme « harm reduction », qui apparaissait pour la première fois dans la résolution de 2023, a non seulement été maintenu mais étendu d’un à trois paragraphes. La proposition russe de retirer le terme a été rejetée par 25 voix contre 10, avec 12 abstentions.
  • Mandat au Haut-Commissariat : le Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDH) est mandaté pour produire un rapport sur les implications des politiques de drogues pour les femmes et les filles. Contrairement aux années précédentes, aucun État n’a objecté à ce que le HCDH produise un nouveau rapport sur ce sujet.
  • Protection de la société civile : le texte appelle les États membres à créer et maintenir un environnement sûr pour que la société civile puisse opérer sans entraves ni représailles. Cette disposition est particulièrement importante face à la répression croissante que subissent les organisations de réduction des risques, notamment dans la région CEEECA (Europe centrale et orientale et Asie centrale), sous couvert de lois sur les « agents étrangers » et la « propagande de la drogue ».
  • Abandon du langage « drug-free » : pour la première fois, une résolution du Conseil des droits de l’homme exclut le paragraphe engageant historiquement la communauté internationale à atteindre une « société libre de l’abus de drogues ». Cet objectif a longtemps été utilisé pour justifier des politiques violant fréquemment les droits humains.
  • Nouveaux enjeux intégrés : la résolution introduit une première référence au droit à un environnement propre, sain et durable dans la conception des politiques de drogues, ainsi qu’un appel à prévenir les impacts négatifs sur l’environnement non seulement de la production et du trafic, mais aussi des réponses politiques elles-mêmes.

Comme le note l’IDPC, cette résolution s’inscrit dans un momentum plus large : en mars 2025, la Commission des stupéfiants a adopté une résolution colombienne historique appelant à une révision indépendante du système mondial de contrôle des drogues. Le Conseil des droits de l’homme affirme ainsi sa place dans un débat international qui s’intensifie.