Boissons au THC : le nouveau visage du cannabis aux États-Unis

Aux États-Unis, une nouvelle tendance agite les marchés du bien-être et des alternatives à l’alcool : les boissons au THC dérivé du chanvre. L’industrie américaine profite d’un vide juridique pour proposer des produits psychoactifs à base de chanvre, légalement vendus dans plusieurs États, y compris certains états qui n’ont pas légalisé le cannabis récréatif, comme le Texas et la Floride. Ces boissons surfent sur la vague du mode de vie « California sober », une sobriété qui exclut l’alcool, mais pas le cannabis.

Un marché en plein essor grâce à un flou légal

La loi américaine permet la commercialisation de produits issus du chanvre contenant moins de 0,3 % de THC delta-9, ce qui a ouvert une brèche dans laquelle s’est engouffrée l’industrie des boissons psychoactives. Grâce à cette faille, les marques peuvent proposer des seltzers ou cocktails au THC dans des magasins d’alcool ou en ligne, souvent sans contrôle strict. Pourtant, ces produits contiennent parfois des doses significatives de THC, et leur origine synthétique ou leur pureté ne sont pas toujours garanties, soulevant des inquiétudes sanitaires.

Néanmoins, depuis 2024, les États américains commencent à règlementer progressivement le marché des cannabinoïdes dérivés du chanvre de diverses manières, fermant ainsi la brèche. Certains ont par exemple promulgué des restrictions d’âge quand d’autres ont limité la puissance du produit.

Des effets rapides et puissants, grâce à la nanoémulsification

Ces boissons utilisent une technologie appelée nanoémulsification, qui permet une absorption rapide du THC, avec un effet quasi immédiat, comparable à celui de l’alcool. Certaines canettes peuvent contenir de 2,5 à 10 mg, voire jusqu’à 100 mg de THC – des doses qui peuvent provoquer des effets indésirables importants, notamment chez les consommateurs novices. Le risque de surconsommation involontaire, en particulier chez les jeunes, est donc une préoccupation croissante.

THC à la place de l’alcool : une substitution prometteuse mais controversée

Certain·es usager·ères se tournent vers ces boissons dans une démarche de réduction des risques, pour éviter les effets néfastes de l’alcool. Le cannabis, en particulier sous forme de boisson, est perçu par certains chercheurs comme un substitut partiel ou potentiel à l’alcool, remplissant plusieurs critères de substitution thérapeutique. Toutefois, les effets à long terme restent incertains, et les experts soulignent que la consommation de THC n’est pas sans risque, notamment en cas d’usage fréquent ou à l’adolescence.

Une situation différente en Europe

En Europe, les boissons infusées au CBD/THC restent presque inexistantes légalement, car tout produit à base de CBD est considéré comme un « novel food » nécessitant une autorisation préalable via le règlement européen 2015/2283. Aucun produit n’a encore reçu cette approbation dans l’UE, malgré plus de 150 demandes soumises et 19 évaluations en cours par l’EFSA. Un obstacle majeur reste la nanoémulsion des extraits, qui exige des évaluations spécifiques en raison de leur structure nanoparticulaire. Certains acteurs européens cherchent à contourner ces règles, par exemple en positionnant leurs produits comme pharmaceutiques plutôt qu’alimentaires comme aux Pays‑Bas, mais cela plonge les produits dans une zone grise juridique.

Le GREA souligne la nécessité de règlementer strictement les produits à base de chanvre en Suisse par le biais du projet de loi sur le cannabis qui sera mis en consultation cet été 2025.